C’est tôt ce matin-là que Simon Limbres se réveille, il rejoint deux de ses amis pour une session de surf. Ce qu’il ne sait pas en fartant sa planche, c’est qu’il ne rentrera jamais. Un accident dans un virage propulse son corps en dehors du van. Arrivé en réanimation, le cerveau de Simon est mort mais le reste de ses organes est intact. Pierre Révol, médecin de réanimation, contacte Thomas Rémige, coordinateur du prélèvement des organes. S’enclenche un processus délicat et précis, celui de la greffe. Mais les parents de Simon, frappés par le drame et la violence de la disparition de leur fils, seront-ils capables d’accepter que les médecins touchent au corps ?
Maylis de Kerangal est habituée aux sujets qui peuvent sembler rédhibitoires et qu’elle seule peut rendre vivants et palpitants. La greffe des organes, surtout le cœur, de Simon Limbres se transforme sous sa plume en véritable épopée, en « geste collective ». Car c’est toute une chaîne humaine qui se forme pour « enterrer les morts et réparer les vivants« , citation de « Platonov » que Thomas Rémige a affichée dans son bureau. Chacun a son rôle à y jouer, a une place dans le processus, dans ce mouvement qui apporte la vie là où d’autres la perdent. Il y a en premier lieu Pierre Révol qui établit la mort encéphalique, passionné par son métier et de ce moment, en 1959, où la mort d’un être humain est déterminée par celle de son cerveau et non plus par celle de son cœur. À Thomas Rémige, l’amoureux fou du chant, revient la douloureuse demande de greffe auprès des parents. Une fois la demande acceptée, tout le processus de recherche de receveurs est lancé. En face, il y a Marthe Carrare, mère de deux fils et traductrice, dont le cœur s’épuise. L’attente, l’espoir rythment son quotidien. « Après quoi, le temps change de nature, il reprend forme. Ou plutôt il prend exactement la forme de l’attente : il se creuse et se tend. Désormais les heures n’ont d’autre usage que d’être disponibles, que l’évènement de la greffe puisse y surgir, un cœur peut apparaître à tout instant, je dois être en vie, je dois me tenir prête. » Et toutes ces questions qui se bousculent : recevoir le cœur d’un autre peut-il changer Marthe ? Comment est mort le donneur ? Comment remercier la famille alors que le don est anonyme ? Les chirurgiens cardiaques, Emmanuel Harfang le ponte et Virgilio Breva le jeune ambitieux, ne lui laissent pas le temps de se perdre en interrogations. Une greffe, c’est aussi une question de temps et on le sent palpiter, s’emballer au fil des pages. L’écriture de Maylis de Kerangal déferle par vagues sur le lecteur. Les mots sont précis, vibrants pour nous montrer ces destins qui se croisent, certains s’enfonçant dans les ténèbres pour que d’autres aillent vers la lumière.
« Réparer les vivants » est un roman qui m’a totalement emportée. La langue de Maylis de Kerangal est irrésistible, elle vous cueille dès les premières phrases pour ne plus vous lâcher.
Tu parles de ce roman superbement bien, je note ce titre
Merci beaucoup, j’avais vraiment envie d’être à la hauteur du talent de l’auteur. Je suis contente de voir que mon billet vous fais envie !
Waouh, quelle souffle dans ton billet ! On entend bien trop parler de ce livre pour que je passe à côté, je le note !
Merci beaucoup, ça me touche vraiment venant de toi. J’avais peur de ne pas savoir rendre la puissance de l’écriture de Maylis de Kerangal.
lu il y a peu et bcp apprécié également!
Je n’ai lu que des avis très positifs sur ce roman et c’est bien normal !
Une merveille !
Entièrement d’accord avec toi !
Tu es un peu en avance pour le blogoclub 🙂 Merci pour ta participation. Je partage ton enthousiasme.
Oui je suis en avance en raison du mois anglais mais je suis aussi en retard car je ne suis pas encore allée voir vos billets !
Hélas pour moi, je ne suis pas sûre d’arriver à franchir le cap de l’abstraction du sujet. J’avoue que ça me fait fuir malgré tout le bien que l’on dit de ce roman partout. J’ai tort, je sais ! 😉
Je comprends, ce n’est pas un sujet attrayant mais je trouve que ça force c’est de le rendre passionnant et littéraire. Peut-être un jour, auras-tu envie de te lancer.
pfff, je viens de lire le billet aussi enthousiaste que celui Sylire….je n’ai jamais vu un livre qui fasse autant l’unanimité, du coup il me fait encore plus peur.
Mais non, il ne faut pas ! C’est très rare que nous soyons aussi unanimes au blogoclub. C’est signe de qualité !
Ce livre est surprenant; cette histoire, au thème peu fédérateur, à priori, emporte tous les lecteurs dans sa vague géante et on ne veut pas en sortir.
C’est effectivement difficile de le refermer, c’est une lecture tellement intense.
A propos d’unanimité, je me sens bien seule à mettre un bémol. Moi je trouve le sujet très intéressant mais le style ne m’a pas emportée!
Ah mince…j’ai adoré son style qui m’a totalement emportée et c’était la même chose pour « Naissance d’un pont ».
Je suis une des rares déçues, notamment à cause de la prose de Maylis de Kerangal, que je n’ai pas du tout aimé. Je l’ai trouvée trop précieuse et trop lourde de mon côté. Elle m’a laissé sur le quai, pour un sujet qui avait toute mon adhésion pourtant 😦
De mon côté, je crois que grâce à son écriture, elle pourrait me parler de n’importe quel sujet !
Pingback: Adieu 2014, hello 2015 ! | Plaisirs à cultiver