
Un « nègre » réputé dans le milieu littéraire (Ewan McGregor) est engagé par une maison d’édition pour rédiger les mémoires de l’ancien premier ministre britannique, Adam Lang (Pierce Brosnan). Celui-ci vit désormais sur une île au large de la Nouvelle-Angleterre, dans une maison moderne plantée sur les dunes au milieu de nulle part, sorte de cube aux larges baies vitrées, froid et impersonnel. Le « nègre » doit s’y rendre pour reprendre le manuscrit écrit par son prédécesseur, retrouvé noyé alors qu’il revenait d’une visite sur le continent.
D’emblée l’atmosphère est tendue dans l’équipe qui entoure Adam Lang, car celui-ci est soupçonné d’être impliqué dans des crimes de guerre en Irak perpétrés du temps de son mandat. Le « nègre » accomplit sa tâche sans passion, juste animé de sa conscience professionnelle. Tout prend une autre dimension lorsqu’il découvre scotchée sous un tiroir une enveloppe laissée là par son prédécesseur. Elle contient des photos et des documents sur le passé d’Adam Lang, révélant des faits que ce dernier a occultés ou falsifiés lors de leurs entretiens pour le livre. Déboussolé et poussé par la curiosité, il découvre également que la mort du « nègre » précédent tient plus du crime que de l’accident. Dès lors le suspense ne fera que s’accentuer jusqu’à la fin.
Les premières scènes du film mettent tout de suite dans l’ambiance : un ferry arrive à quai sur l’île (décidément… voir Shutter Island), les voitures sortent une à une mais l’une d’elles reste sur le ponton, sans conducteur ; le plan suivant montre de loin, sur une grande plage déserte, un corps échoué ballotté par les vagues. Tout est à l’avenant dans ce film, tout contribue à installer une aura de mystère et d’angoisse diffuse. Comme l’île au ciel plombé, ce paysage hivernal de landes battues par le vent et la pluie, le quai désert du ferry à la tombée de la nuit, l’hôtel dont le « nègre » est le seul client… Comme les personnages également, d’Adam Lang, homme de pouvoir sans pouvoir pris au piège de son passé, à l’inquiétant Paul Emmett (Tom Wilkinson), son ancien professeur à l’université et homme de main de la CIA, en passant par la cassante épouse d’Adam Lang, Ruth (Olivia Williams), femme d’influence et de caractère, opiniâtre et manipulatrice.
Ewan McGregor incarne à merveille un jeune type banal, habitué à un statut d’homme de l’ombre qui semble parfaitement lui convenir, mais qui décide pour une fois de ne plus s’en laisser conter et pour cela va mettre sa vie en jeu. Il est de toutes les scènes et le spectateur mène l’enquête avec lui, va de surprise en révélations, essaie d’échapper à ses poursuivants, risque sa peau avec lui. Jusqu’à cette géniale scène finale très – désolé pour ce qualificatif mille fois rebattu, mais je trouve pour le coup que la référence est évidente – hitchcockienne. Bref, Polanski a magistralement réalisé ce thriller politique à l’ambiance trouble, grâce à une mise en scène millimétrée et un grand sens du détail. Accrocheur.
Comme tu sais, je n’ai pas été séduite… et je suis d’accord : ce McGregor est juste banal…
J’adore Polanski et j’adore l’intrigue donc j’irai voir ce film… En attendant qu’il soit à l’affiche, je vais voir une autre histoire de « nègre » dans un autre registre : « l’autre Dumas »… Ce billet est très accrocheur aussi !!!! Mille fois convaincue !
Tout à fait d’accord avec toi ! Et j’ajoute que ton billet donne très envie d’aller le voir !
@Ys : j’ai bien aimé cette histoire, la mise en scène, l’ambiance. Le personnage du « nègre » est effectivement un type banal, mais pas McGregor, l’acteur, c’est bien ce que tu voulais dire ?
@maggie : c’est vraiment un très bon film, avec une bonne mise en scène et qui dégage une atmosphère particulière. Je ne suis pas sûr d’avoir envie d’aller voir « L’autre Dumas », tu me diras ce que tu en as pensé.
@kathel : merci, donner envie de voir des films et de lire des livres, et partager des impressions, c’est le but de ce blog.
Je sors de la projection ce soir ! Un vrai bon moment aussi. J’ai trouvé quelques passages un peu lents (mais je suis du genre un peu speed et ça n’a pas été l’avis des amis qui m’accompagnaient donc…). En revanche, j’ai adoré la mise en scène, la lumière et le cadre (l’île est vraiment magnifique !!). Et bien vu pour le sens du détail, c’est très vrai !!
Je vois que tu as aimé aussi. C’est vrai que ce film est un modèle de mise en scène et d’ambiance noire.
« The Ghost Writer » , délice offert par un géant du cinéma, martyrisé par un pays liliputien. Reprise fidèle du livre de Robert Harris, « L’homme de l’ombre ». L’auteur et le cinéaste ont préparé ensemble le film. Polanski est un homme constamment pris au piège des méchants. Le livre l’a attiré.
C’est surtout le thème de la machine étatique broyant les hommes qui m’intéresse. Tant que ce sera encore possible, la Démocratie restera souffrante.
Le livre fait penser à tous ces bouquins bidons écrits par des « nègres » pour ceux qui nous gouvernent, aux écoutes, aux polices politiques, aux barbouzes, aux crimes impunis pour raisons d’Etat ( Boulin etc…) Dans le film, le nègre, pour avoir balancé tout ça, est assassiné entre deux voitures. C’est la démocratie que l’on tue dans la rue. Ses meurtriers ne sont jamais rattrapés par la Justice, comme l’est Polanski accusé d’être accusé et poursuivi par une meute de grossiers rabatteurs d’échafaud!!!.
Je ne savais pas (et je n’ai pas fait attention) que le scénario était tiré d’un livre. C’est vrai que les sujets autour du pouvoir étatique et ses manipulations sont toujours intéressants. A ce sujet je te conseille « Le Sicilien » de Norman Lewis (tu connais peut-être), livre sur lequel un billet paraîtra bientôt sur ce blog.
Bonsoir, j’ai trouvé The Ghost writer brillantissime (voir mon billet du 05/03/10). Ewan Mc Gregor trouve un de ses meilleurs rôles. Pierce Brosnan en ex 1er ministre est parfait. Les femmes ne sont pas en reste et la mise en scène est un modèle du genre. Bonne soirée.
Visiblement nos impressions sont identiques. Entièrement d’accord avec ton commentaire.