La rétrospective du Grand Palais nous permet de redécouvrir un peintre d’origine suisse, naturalisé français en 1900, Félix Vallotton. Un artiste dont l’œuvre étonnante ne s’est inscrite dans aucun courant, ce qui explique probablement son oubli auprès du grand public. L’exposition ne se fait pas de manière chronologique mais par thèmes, par exemple : idéalisme et pureté de la ligne, perspectives aplaties, refoulement et mensonge, opulence de la matière, érotisme glacé, etc…
La grève blanche, Vasouy, 1913
La première caractéristique de la peinture de Valloton est son traitement en aplats de couleurs juxtaposées. La perspective classique se déplace en haut ou en dehors du tableau, donnant des images étonnantes, presque surréalistes ou oniriques. Ce goût pour les aplats lui venait de l’estampe japonaise mais également de sa pratique de la xylographie (Vallotton vivait de ses estampes qui sont largement représentées dans l’exposition).
Il travailla également à partir de photos qui lui permettaient de développer la bidimensionnalité des images. Cela le rapprocha du groupe des Nabis qui travaillaient en aplats et créaient une peinture très décorative. Mais Vallotton, ce sont également des contours nets et soulignés notamment dans les nus. Les fonds sont neutres, colorés.
Nu couché au tapis rouge, 1909
Malgré une forme moderne, Félix Vallotton souhaitait s’inscrire dans une tradition classique. Ses influences majeures sont Manet (Olympia est détournée dans « La femme au perroquet » et « La blanche et la noire ») et surtout Ingres avec des corps de femmes nues à la peau laiteuse et parfois à l’anatomie douteuse (« Le bain turc » ou « La salamandre »). Ses thèmes sont tirés de la peinture classique comme les natures mortes ou les mythologies en grand format. Ses derniers tableaux sont volontairement grotesques et kitsch mais ils sont assez difficiles à apprécier aujourd’hui ! Cela lui permet d’aborder de manière détournée des thèmes d’actualité comme la première guerre mondiale dans « Orphée dépecé » ou l’émancipation de la femme dans « Femme lutinant un Silène ».
La femme est au centre de l’œuvre de Félix Vallotton. Il montre pour le sexe opposé une grande attirance et une immense répulsion. Le corps de la femme lui plaît comme le démontrent les nombreux nus présents dans l’expo. Mais il ne s’en dégage aucune sensualité, les carnations sont froides, les regards indifférents ou ailleurs. La femme est également manipulatrice, source de drames ou de conflits. « Le provincial » montre un homme qui va se faire plumer par cette élégante femme fatale. « La chaste Suzanne » n’est plus effrayée par les deux vieillards mais les convoite. L’atmosphère des scènes d’intérieur est lourde, annonciatrice de drame, de larmes, de tromperie. Vallotton voyait d’un très mauvais œil l’avènement du féminisme et ses difficultés conjugales ont accentué son dégoût. La tableau « La haine » montre la femme comme un monstre de mépris, de violence.
Félix Vallotton est un peintre qu’il fallait remettre à l’honneur pour l’originalité de ses cadrages, la complexité de ses thématiques, pour ses talents de coloriste et d’illustrateur.
Mouais… je vais me contenter de ton billet. Heureusement que tu nous donnes des explications parce que ça ne me parle pas du tout.
Je comprends que tu ne sois pas convaincue, c’est une peinture très particulière. D’ailleurs je n’ai pas tout apprécié. J’ai préféré la période où il est proche des Nabis.
A l’inverse de Lilly, sa peinture me parle beaucoup. J’avoue que son nom ne m’évoquait pas grand chose avant l’exposition, mais j’ai bien envie d’y aller !
Il est très peu connu en dehors de quelques toiles comme « Le ballon » du musée d’Orsay. Je le connaissais par le biais des Nabis mais cela ne représente qu’une petite partie de son travail.
Je connaissais pas ce peintre avant de voir fleurir en librairie catalogues et autres ouvrages à l’occasion de cette expo. Il y a un côté naïf par le dessin mais en même temps sombre par les couleurs. Encore une belle découverte à faire! 😉
Ce’st vraiment une bonne chose que cette expo qui permet de le redécouvrir. C’est un personnage à part dans la peinture de son époque et il voulait l’être. J’ai apprécié les mêmes choses que toi : les coloris très forts et froids, les aplats qui donnent un côté naïf au dessin.
Tu donnes vraiment envie d’aller la voir cette expo, surtout que je connaissais vaguement ce peintre par les nabis… Merci pour toutes les explications, c’est fabuleux, en ce moment, il y a plein d’expo qui me tente, c’est horrible ! J’adore ton choix d’illustrations qui m’a fait vraiment découvrir ce peintre !
Je suis également débordée par le nombre d’expos qui m’intéressent, j’espère réussir à toutes les voir mais ce n’est pas gagné. J’aurais voulu mettre encore d’autres œuvres parce qu’il y en a beaucoup que j’aime.
PS : Pourrais-tu stp m’envoyer ton lien de Cook, le lieu-dit de l’tang noir ? Je ne le trouve pas sur ton site…
Il est dans mes brouillons depuis des mois…
Celle-ci il ne faut pas que je la rate !
Tu as encore du temps pour t’y rendre et en plus il n’y a pas trop de monde. C’est bien les artistes méconnus !
Tu sais comment nous donner envie !
Merci, c’est vrai que Vallotton n’attire pas les foules alors qu’il est fort intéressant.
Trop d’expositions à voir absolument, donc celle-ci ne me tentant que moyennement, je la sacrifie !
Je te comprends, je vais sûrement en sacrifier parce qu’il y en a trop en ce moment qui me plaisent !
J’avais écarté cette expo (il y en a tellement de passionnantes en ce moment) mais ton billet attire mon attention dessus, tes commentaires et aussi les illustrations. Je me rends compte que finalement, c’est un artiste que je ne connais pas du tout.
« Le ballon » est le plus connu mais j’ai découvert la plupart de ces tableaux. Je n’ai pas tout aimé, les œuvres mythologiques sont vraiment trop kitsch pour moi, mais dans l’ensemble j’étais bien contente de le découvrir mieux.
Hormis la dernière, je ne connaissais pas ce peintre. Merci pour ce billet éclairant ! 🙂
« Le ballon » est le tableau le plus connu tout simplement parce qu’il est au musée d’Orsay et du coup plus souvent reproduit. C’est vrai aussi que le courant Nabis n’est pas forcément le plus connu non plus !