Une photo, quelques mots (196ème) – Atelier d’écriture de Leiloona

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© Vincent Héquet

Le froid s’était intensifié depuis une dizaine de jours. Il s’insinuait douloureusement sous les couches de vêtements, nous saisissait jusqu’à la moelle. Même les animaux avaient du mal à le supporter. Ils se terraient, se cachaient tant que la faim ne les obligeait pas à sortir. Mes parents et moi tentions de faire de même. Mais la faim ne nous laissait que peu de repos. Elle nous tenaillait, nous obsédait. Il fallait sans cesse tenter de combler ce vide, ce manque qui était devenu notre unique moteur.

Mais la neige, la glace rendaient les choses plus difficiles. La végétation s’était elle aussi mise à hiberner. Tout autour de nous, les paysages étaient figés dans une mort glacée, rien ne semblait avoir survécu.

Il nous fallait avancer toujours, inlassablement en espérant trouver quelques baies, quelques noix pour calmer nos crampes d’estomac. Pas de quoi nous remplumer suffisamment pour résister à la morsure du froid. Les abris se faisaient rares également, il fallait toujours se méfier des prédateurs, animaux ou humains.

A force de marcher, nous arrivâmes dans un ancien bâtiment. Mon père inspecta chaque recoin, l’endroit était vide et nous allions enfin pouvoir nous reposer. Mes parents semblaient pourtant bien tristes. Ils m’expliquèrent alors que ce bâtiment en ruines avait été un supermarché dans le monde d’avant, que l’on y trouvait tout ce dont on avait besoin et bien plus encore. Les gens y venaient régulièrement pour s’acheter à manger, pour se vêtir. Un lieu de profusion, un lieu où rien ne manque…

Mes parents me racontaient parfois comment était la vie dans le monde d’avant mais leurs regards se teintaient toujours d’une intense mélancolie. Je ne posais alors aucune question, je n’insistais pas.

Cette nuit nous allions pouvoir dormir à l’abri, protégés du froid et du vent, peut-être allions-nous réussir à dormir, peut-être allais-je rêver de cet endroit qu’avant on appelait supermarché, peut-être allais-je rêver du monde d’avant.

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16 réflexions sur “Une photo, quelques mots (196ème) – Atelier d’écriture de Leiloona

  1. Cette photo aura vraiment inspiré des visions du monde après une catastrophe qui n’est pas nommée,et la lutte quotidienne pour survivre….J’ai aimé le rapport parents-enfants,la tristesse et la nostalgie de ceux qui ont connu »avant »,servi par une écriture sans fioritures…..

    • Ce petit brin d’herbe a été un beau symbole d’espoir dans beaucoup de texte malgré nos visions apocalyptique. Cette photo était vraiment prémonitoire par rapport à ce que nous avons vécu.

  2. Cette photo m’avait donné aussi d’écrire un texte post-apocalyptique. La destruction de l’homme par l’homme et la nature qui reprend ses droits. J’ai pris toute la semaine des notes. Notes que j’ai laissé de côté samedi pour ne parler que de la nature, que de l’après.

  3. Je ne sais pas ce qui serait pire du froid ou de la chaleur. Aucun des deux sans doute, ou les deux à la fois. Tu rappelles qu’il faudrait être plus vigilant, plus attentif à notre environnement dans ce beau texte si expressif.

    • Malheureusement, je ne suis pas très optimiste, je n’ai pas l’impression que nous évoluons dans le bon sens et que nous attendons des catastrophes pour réagir.

    • Oui, mon inconscient s’est servi de cette lecture pour ton atelier, des réminiscences mais je me souviens que j’avais trouvé sa vision très réalistes. Je ne serais pas étonnée de voir notre monde tourner ainsi.

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