« Orlando » de Virginia Woolf est un roman surprenant. L’intrigue débute au XVIème siècle. Orlando est alors un adolescent, aristocrate qui bénéficie des largesses de la reine Elizabeth. « Car le vieille femme aimait Orlando, et la Reine qui savait reconnaître un homme quand elle en voyait un (…) rêva pour lui d’une splendide carrière. Elle lui donna des terres, elle le dota de maisons. » Lors du grand gel qui s’abattit sur l’Angleterre durant le règne de Jacques Ier, Orlando tomba éperdument amoureux d’une princesse russe : Sacha. Celle-ci trahit Orlando qui, éperdu de douleur, décide de fuir la gente féminine. C’est pour cette raison que, deux siècles plus tard, Orlando demande au roi Charles de le nommer ambassadeur à Constantinople. C’est dans cette ville qu’Orlando se réveille en femme après une longue léthargie. Elle retourne alors en Angleterre au moment où s’éveille le XIXème siècle : « Tandis que frappaient les 9ème, 10ème et 11ème coups, une ombre énorme croula et couvrit Londres. Et quand le 12ème coup de minuit sonna, la nuit était complète. Un noir déluge tumultueux avait noyé la ville. Tout n’était que ténèbres, que doute, que chaos. Le XVIIIème siècle avait vécu, le XIXème venait de naître. » Orlando commence alors à apprivoiser sa nouvelle identité.
Comme mon résumé vous l’aura montré, « Orlando » est une fable, un conte où le personnage traverse les époques et se métamorphose. Le personnage reste néanmoins le même, Orlando reste passionné(e) par la nature et la littérature. Depuis son plus jeune âge, le personnage admire les écrivains et rêve d’en devenir un. Ce personnage ambigu sexuellement et qui deviendra une femme de lettres, permet à Virginia Woolf de rendre hommage à sa très chère amie Vita Sackville-West. Certains éléments de sa biographie sont reconnaissables : la reine Elizabeth avait donné le château de Knole aux Sackville-West au XVIème siècle, l’amour d’Orlando pour Sacha évoque l’histoire de Vita et de son amie d’enfance Violet Trefusis, Orlando est ambassadeur à Constantinople tout comme le mari de Vita. Ouvertement bisexuelle, Vita put, comme Orlando, profiter des avantages des deux sexes : « (…) il est certain qu’elle récolta ainsi double moisson ; les plaisirs de la vie furent accrus pour elle, et ses expériences multipliées. Elle échangeait contre la rigueur des pantalons la séduction des jupons, et connaissait la joie d’être aimée des deux sexes également. » La liberté de Vita fascinait Virginia Woolf. « Orlando » lui permet d’expérimenter la multiplication des identités, des réalités et des possibilités. Néanmoins cette allégorie des différents « moi » se teinte de mélancolie, le « moi » profond d’Orlando reste insaisissable.
Durant tout le roman, Orlando est traversé(e) de moments mélancoliques. Le personnage pense souvent à la brièveté de la vie, il est méditatif, replié sur soi. Même la littérature qu’il vénère n’est pas une source de plaisir. Orlando est en mal de littérature, en mal d’écrire. Le roman se conclut sur un ton totalement mélancolique. On est alors en 1928 et le monde a beaucoup changé. Orlando vit toujours dans le même château où rien n’a été modifié. Mais les objets semblent lui échapper, elle se sent repoussée par les pièces du château. Tout se rattache au passé, les souvenirs affleurent sans cesse, Orlando ne vit plus dans le temps présent. Cette part du personnage est très proche du caractère de Virginia Woolf qui a mis en valeur dans son oeuvre l’éphémère de nos sensations, de nos vies.
« Orlando » parle donc des sujets de prédilection de Virginia Woolf : la brièveté de nos vies, la difficulté de créer et le questionnement sur l’identité. « (…)la plus longue lettre d’amour de l’histoire« , comme le fils de Vita définissait « Orlando », est un roman certes complexe mais il est surtout d’une poésie folle.
Lu dans le cadre d’une lecture commune avec Lou, DeL.
Noté évidemment ! Ce Lady Swap et ses lectures afférantes sont décidement une excellente idée (surtout pour moi qui n’a encore jamais lu V. Woolf !) :))
@Pickwick : Merci, je suis contente que notre idée te plaise ! Je te conseillerais de commencer Virginia Woolf plutôt avec « Mrs Dalloway ». C’est mon roman préféré de cet auteur et je pense qu’il est plus abordable que « Orlando ».
Ah je l’adore ce roman, je l’avais trouvé très bien construit et très amusant!
Je n’ai jamais lu cette auteur. J’y remédierai certainement un jour, mais curieusement, « Mrs. Dalloway » ne m’attire pas vraiment… alors pourquoi pas celui-là…
@Cryssilda : C’est un roman vraiment très original. J’en avais un peu peur avant de le lire mais c’est un plaisir de le lire.
@Ys : Si tu aimes les romans surprenants, celui-ci est pour toi ! Je le trouve très différent de « Mrs Dalloway ». Dans « Orlando », tu trouves beaucoup de choses : de l’amour, de la mélancolie, de l’humour, de la littérature…c’est très varié.
Titine, j’ai vraiment honte : tu me sortir de la liste de la lecture commune. Voici 2 semaines environ que je suis en train de lire Pierre de Lune… C’est un long roman, captivant,(je ne veux plus le quitter) et je suis un peu fatiguée en ce moment… Je ne l’ai donc pas encore lu mais peut-être en avril…
Moi aussi j’ai honte ! Je suis accaparée par d’autres lectures qui ne peuvent attendre et je ne vais donc pas lire Orlando tout de suite. Mais ce roman m’intrigue vraiment, il a l’air si bizarre !
Hum… je n’ai pas ouvert un roman depuis plusieurs semaines je crois. Moi aussi j’ai honte…
@Maggie, Mea et Lilly : Je vous retire de la liste alors, je ne veux surtout pas que vous ayez honte !!! Il ne faut surtout pas vous en faire, ce n’est vraiment pas grave. J’espère quand même vous avoir donnée envie de lire « Orlando » bientôt. C’est un roman étonnant et très réussi.
Pour cause de Rebecca, je n’ai pas lu Orlando… mais il y passera, comme les autres!!!!
@Keisha : J’espère que tu le liras, « Orlando » vaut vraiment le coup ! Je vais aller lire ton billet sur « Rebecca » que j’adore également !
Il me fait quelques frayeurs mais le début me plaisait alors j’ai hâte de découvrir la suite… car comme je te l’ai dit vendredi j’ai finalement lu un autre Woolf, débordée que j’étais 🙂
@Lou : Je suis bien contente que cette lecture commune n’ait obligé à lire « Orlando » qui me faisait peur. C’est vraiment un plaisir et tu verras la partie où il devient une femme est très intéressante. La vision de Virginia Woolf du XIXème est marrante, notre époque fétiche est recouverte d’un épais brouillard sombre !!! Je vais aller voir quel roman tu as lu.
J’ai « Vers le phare » dans ma PAL de longue date mais Virginia Woolf est unauteur qui m’effraie. Va savoir pourquoi !
@Manu : Elle a une réputation d’auteur difficile, c’est vrai qu’il faut faire un effort pour rentrer dans son monde mais qu’est-ce que c’est gratifiant ! « Orlando » est en plus très amusant. Peut-être devrais-tu commencer par « Mrs Dalloway » que je trouve très abordable.
Le côté drôle (pas hilarant non plus, on n’est pas là à se tordre de rire), plein d’esprit (witty comme dirais les anglais!) est ce qui m’a le plus plu dans ce roman, qui détonne dans son oeuvre. Et avec ce ton elle a quand même su ajouter sa patte poétique, vraiment pour moi Orlando est un chef d’oeuvre.
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Amélie
@Amélie : Je suis entièrement d’accord avec toi, ce livre est vraiment plein d’esprit ! Connaissant déjà quelques romans de Virginia Woolf, j’étais un peu effrayée par « Orlando » qui est totalement à part. Mais j’ai bien fait de m’y mettre, c’est un enchantement !
Il y a si longtemps que je n’ai pas lu Virginia. Orlando bien sûr mais je m’étais régalée de « Toute passion abolie » de Vita , j’y retournerai volontiers vers ces deux là…Le temps de…et puis voilà, ça passe
@Sabine : J’ai découvert Vita grâce à Virginia, « Orlando » m’a donné envie de la lire étant donné l’admiration de Virginia. Pour le moent j’ai lu « Haute société » et « Paola » et je me suis régalée !
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