Les luminaires d’Eleanor Catton

luminaires

Le 27 janvier 1866, Walter Moody débarque à Hokitika, sur la côte Ouest de la Nouvelle Zélande. L’appel de l’or, de la fortune l’ont mené sur cette terre loin de son Écosse natale. Après un voyage mouvementé, Walter Moody se trouve un hôtel où se reposer. Avant d’aller se coucher, il décide de passer au fumoir. S’y trouvent déjà douze hommes. L’atmosphère est lourde, tendue et étrangement silencieuse. Un nommé Thomas Balfour, agent maritime de son état, finit par engager la conversation avec Moody. Il semble le sonder, le jauger. Rapidement, Walter Moody se rend compte que les douze hommes s’étaient réunis volontairement et qu’il est un intrus dérangeant. Après moults discussions, le nouvel arrivant est jugé fiable et digne d’entendre la raison de cette réunion nocturne. Le 14 janvier 1866, des évènements marquèrent le port d’Hokitika : Anna Wetherell, prostituée, avait failli mourir ; Crosbie Wells, un ancien prospecteur, était bel et bien mort chez lui ; Emery Staines, un jeune homme enrichi grâce à un bon filon, avait disparu. Chacun des hommes présents dans le fumoir (apothicaire, aumônier, fondeur d’or, journaliste ou encore vendeur d’opium) a eu un rôle durant le 14 janvier. Chacun va raconter sa vision de cette journée, chacun est une partie du puzzle que Walter Moody va tenter de reconstituer.

« Les luminaires » a obtenu en 2013 le célèbre Booker Prize, Eleanor Catton devenant ainsi le plus jeune auteur à l’obtenir. Son formidable roman est inspiré par la littérature du 19ème siècle. On pense bien entendu à Charles Dickens pour le souffle narratif, à Wilkie Collins pour le côté mystérieux et ésotérique et surtout à Robert Louis Stevenson. Car « Les luminaires » est avant tout un roman d’aventure. Celle des diggers nouvellement débarqués dans ce pays dans l’espoir d’un nouveau départ et de la fortune. Une bouillonnante nouvelle société se crée autour des recherches d’or. Eleanor Catton sait merveilleusement bien planter ce décor, faire revivre cette Nouvelle Zélande accueillant ceux qui fuient l’Europe, ceux qui veulent se réinventer. Hokitika et « Les luminaires » condensent ce qui peut advenir à ces hommes : mort, trahison, amour, complot, superstition, chantage, vengeance, jalousie.

Et pour conter cette fresque, Eleanor Catton utilise une narration audacieuse, ample et ambitieuse. Le livre comprend douze chapitres, douze comme les signes astrologiques. Chaque chapitre comporte  un thème astral qui semble présider à la destinée des différents personnages. Le premier chapitre fait 433 pages et les derniers seulement quelques pages, voire une seule. L’intrigue a besoin de temps pour se mettre en place et une fois l’énigme installée, le rythme peut s’accélérer. Les récits s’entrecroisent, les destins se chevauchent, le suspens se noue et se dénoue selon les points de vue présentés. « Les luminaires » est un enchevêtrement d’histoires et il faut s’accrocher pour les suivre, les comprendre mais cela en vaut la peine.

Voilà un livre à l’intrigue complexe, foisonnante, au souffle romanesque indéniable qui m’a conquise, emportée et que je vous conseille très fortement si vous rêvez d’aventures et d’énigmes.

Un grand merci aux éditions Phébus.

27 réflexions sur “Les luminaires d’Eleanor Catton

  1. Je l’avais noté pour la Nouvelle – Zélande et tu as totalement achevé de me convaincre. Tu as trouvé les mots qu’il faut : Dickens, Stevenson, Collins. Comment résister à cet assemblage? ☺

    • J’ai totalement craqué aussi lorsque j’ai vu les références auxquelles ce livre fait appel. Et puis la ruée vers l’or en Nouvelle-Zélande m’intriguait !

  2. Depuis que j’ai lu l’île au trésor que je ne pensais pas aimer, je sais que j’aime les romans d’aventures ! Je note pour son style XIXeme siècle !

    • Il faut toujours essayer au moins une fois pour savoir si on aime un genre ou non. Et puis Stevenson, c’est toujours un régal quoiqu’il nous raconte !

  3. Zarline avait été un peu déçue, mais comme il est à la bibli, je comptais quand même le lire, ton billet y contribue!!!

    • Je suis allée lire son billet et je comprends ses raisons. Il est vrai que certaines choses restent inexpliquées mais l’essentiel est clair à la fin. J’ai également vu qu’il l’avait lu sur une longue période et je crois que c’est vraiment un roman auquel il faut se consacrer et qu’il faut le lire d’une traite pour l’apprécier.

  4. Il m’intrigue celui-là (je trouve la couverture française nettement moins jolie que l’originale) … Je note que ton avis est positif mais je crois que j’attends encore un déclic avant de me lancer dans un roman aussi énorme (et lourd lol).

    • C’est vrai qu’il faut avoir du temps devant soi pour se lancer car il faut s’y plonger totalement pour l’apprécier. J’ai moi-même attendu d’avoir une semaine de vacances pour l’ouvrir !

  5. Il me tentait bien et puis j’ai lu une chronique d’un lecteur déçu ce qui m’a fait hésiter devant cet énorme pavé. Certains de tes mots me donnent envie.

    • Je comprends les avis mitigés car il reste des zones d’ombre mais cela donne une atmosphère mystérieuse au récit. C’est également un roman dans lequel il faut s’immerger totalement pour ne rien perdre de l’intrigue complexe.

  6. J’ai noté précieusement ce titre ! Il me fait terriblement envie, d’autant qu’il ne semble susciter que d’excellents avis.

    • Oui je plussoie et je te le conseille chaleureusement ! Par contre, il faut être bien disponible pour le lire et pour éviter de se perdre dans les méandres des récits.

  7. Tu donnes vraiment envie de découvrir ce roman! Je le mets dans ma liste de « au-cas-où-je-le-croise-en-bib! »! Mais je vois que tu dis qu’il faut être bien « disponible » pour le lire, je vais donc attendre un peu avant de me lancer à sa recherche…

    • Et je me demandais où allait m’entrainer ce voyage en Nouvelle-Zélande mais je me suis trouvée en terrain commun avec une ambiance très 19ème, pleine de mystères et d’aventures !

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