Tout le monde lui avait dit de ne pas y aller. Mais il fallait qu’elle y aille, qu’elle voie par elle-même pour stopper l’emballement de son imagination.
L’ancien bureau de poste se situait un peu à l’écart de la ville. Le lieu était devenu un terrain vague mangé par les mauvaises herbes. Certaines étaient si hautes qu’elles masquaient en partie le bâtiment. Elle y pénétra en enjambant les ronces, il fallait vraiment avoir envie de s’isoler pour venir ici. Elle demeura en arrêt dans l’entrée. C’était encore pire que ce qu’elle imaginait. La décrépitude du lieu donnait froid dans le dos. Le papier-peint décollé, moisi, les vitres absentes, le métal gangréné par la rouille, la mousse à la place de la moquette, le bâtiment était une ruine absolue. Elle se sentit soudain gagnée par un fort sentiment de solitude, par la mélancolie des lieux désaffectés. A part le vent qui s’engouffrait dans les ouvertures béantes des fenêtres, le bâtiment était étrangement silencieux comme si toute vie l’avait quitté. Le néant. Le mutisme des murs déliquescents.
Quelques traces de passages ponctuels jonchaient le sol. Des bouteilles vides, des mégots de cigarettes ou de joints ponctuaient l’espace. Un point de rendez-vous pour les jeunes du coin, à l’abri des regards et des adultes. Un lieu d’expériences en tout genre… ne pouvaient-ils pas trouver un endroit moins sordide ? Les larmes commençaient à monter, la douleur sournoise, assourdie par les cachets, se réveillait. L’incompréhension était toujours vive. Comment Chloé avait-elle pu en arriver là ? Quel mal-être invisible avait poussé sa fille à venir ici et à mourir une seringue dans le bras ? Ses amis avaient raison, elle n’aurait jamais dû venir ici.
On imagine fort bien son désarroi en effet. Texte très émouvant!
Merci beaucoup Sabine, tes compliments me font toujours grand plaisir tant j’apprécie tes textes.
Ouh là … effectivement je comprends ton commentaire sur un autre texte à propos du côté léger que tu n’avais pas trouvé …
Terrible, oui. Belle retranscription des émotions.
Je t’avais bien dit que j’allais faire glauque ! Désolée pour ma tendance à voir tes photos du côté obscure de la force !
Dur texte… court et percutant (au contraire du mien, vraiment, vraiment long! 🙂 )
Mais c’est bien aussi d’écrire des textes longs, tout dépend de l’inspiration de toute façon.
Texte extrêmement poignant ! Peut-être que cette mère a eu raison de venir dans ce lieu ? Voir est parfois mieux qu’imaginer.
Merci Albertine, je trouve aussi qu’il vaut mieux voir que de tenter d’imaginer en vain.
Je suis d’accord avec Albertine. Parfois, il faut mieux voir pour affronter et faire son deuil. Terrible sujet. Très bien traité….
Merci beaucoup Anne-Véronique, effectivement je crois aussi qu’il vaut mieux voir pour mieux éteindre la douleur.
Beau et tellement triste…..Tes mots ont un pouvoir puisque là tout de suite,je suis triste….C’est donc que ton texte est fort….
Quel beau compliment tu me fais Bénédicte, merci !
Ah la vache ! C’est terrible, ton histoire ! ça me prend aux tripes !
Désolée mais cela veut dire qu’il est efficace ! 😉
Pas gai ton texte. Cette photo t’a emmené dans des territoires bien obscures.
J’avais commencé par imaginer une histoire plus joyeuse mais ça ne venait pas. On ne choisit pas toujours où nous emmène l’inspiration !
Ton texte est poignant avec une belle description de ces émotions terribles. Bravo !
Merci beaucoup Nady, tu me fais plaisir !