Le 27 décembre 1974, un coup de grisou tue quarante deux mineurs à la fosse St Amé de Liévin-Lens. Un 43ème meurt de ses blessures en janvier 1975. Il s’appelait Joseph Flavent. Son frère, Michel, ne se remettra jamais de son décès. Il vénérait son frère et ne supporte pas que celui-ci ne soit pas comptabiliser parmi les morts de la mine. Joseph n’a pas eu droit à l’enterrement collectif et aux honneurs de la République. Peu de temps après, le père de Joseph et Michel se suicide et laisse un message à son fils cadet : « Venge-nous de la mine ». Michel, qui a 16 ans au moment du drame, passe sa vie à recueillir des informations sur les dysfonctionnements de la mine. La catastrophe aurait pu être évitée et les responsables de la mine auraient du être jugées pour négligence. Michel, devenu adulte, est prêt à prendre sa revanche sur les Houillères.
Les livres de Sorj Chalandon sont des colères, des rages qu’il met en mots. « Le jour d’avant » est un hommage, une stèle dressée pour rendre justice aux mineurs de la fosse St Amé. Grâce à de très nombreux détails, à un travail documentaire fouillé, nous prenons conscience du quotidien des mineurs, de la dureté de leurs conditions de travail mais également de la solidarité qui existait entre eux. Il y avait beaucoup de dignité chez ses ouvriers qui aimaient leur travail et leur horizon de terrils. Les quarante deux mineurs morts sont à imputer à l’avidité des directeurs de la mine et c’est ce que dénonce avec force Sorj Chalandon.
Mais ce roman comporte également un pan psychologique très marqué. Le héros, Michel Flavent, s’avère plus complexe qu’il n’y parait au départ. C’est un homme détruit par la mort de son frère et qui a l’esprit durablement perturbé. Et Sorj Chalandon écrit un formidable roman sur la culpabilité, celle qui ronge le cœur comme la rouille et qui aveugle. Un sentiment qui écrase tout sur son passage et décide de toute une vie. La psychologie de Michel est finement analysée et amène Sorj Chalandon à prendre son lecteur par surprise pour donner encore plus d’épaisseur à son roman.
C’est à nouveau avec une écriture sèche, sans maniérisme que Sorj Chalandon réussit à nous émouvoir. « Le jour d’avant » est un mélange de colère, de tristesse, c’est un bel hommage rendu à l’ensemble des mineurs qui ont laissé leurs vies au fond de la mine : ceux morts dans la fosse St Amé et ceux morts à petit feu de silicose.
Et c’est un beau billet pour rendre hommage à ce roman. Je partage ton avis, j’ai beaucoup aimé cette lecture.
Merci Tiphanie, c’est vraiment un roman très touchant et je ne m’attendais pas du tout au twist sur le personnage principal !
Sorj Chalandon, je le « connais » de par son job de journaliste au Canard et j’ai bien envie de découvrir son autre plume, celle d’auteur de roman !
Il est excellent dans tous les domaines Sorj Chalandon ! Ses romans expriment tout ce qu’il ne peut pas dire en tant que journaliste. Ils sont bien évidémment beaucoup plus personnel que ce qu’il fait au Canard ou ce qu’il faisait à Libération.
J’adore sa plume aussi, je vais me faire une plaisir de lire son roman !
Il a sans doute plus de liberté au palmipède qu’à libé, le coin-coin vit sans pub, il reste donc plus libre…
J’avais beaucoup aimé Le quatrième mur et Une promesse. Celui-ci me tente beaucoup, le sujet est passionnant, je l’ai noté, mais ça ne va pas être pour tout de suite!
C’est toujours un plaisir de retrouver la plume de Sorj Chalandon, ses livres sont toujours très touchants.
Magnifique billet sur ce livre que j’espère découvrir aussi bientôt!
Merci, je peux te le prêter si tu veux. C’est, comme toujours avec Sorj Chalandon, un livre extrêmement touchant et humaniste.
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On dirait que tu as eu un coup de coeur 🙂
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