© Kot
« Quand le matin le soleil venait de derrière l’hôtel, découvrant devant moi les grèves illuminées jusqu’aux premiers contreforts de la mer, il semblait m’en montrer un autre versant et m’engager à poursuivre sur la route tournante de ses rayons, un voyage immobile et varié à travers les plus beaux sites du paysage accidenté des heures. » Anne est loin, loin de ce bus qui la ramène chez elle après plus d’une heure de transport. Elle est sur une plage ensoleillée de Normandie, à Balbec avec le narrateur et sa grand-mère. La longueur du trajet d’Anne se noie dans le rythme des mots, leur poésie. Son temps devient celui de l’auteur, il est suspendu à chaque virgule, chaque point. Le vent vivifiant de la mer, son azur limpide nettoient la pluie, éclairent la nuit opaque.
Les bip bip répétés des touches d’un téléphone portable la ramènent par moments à la réalité de ce bus de banlieue. Elle s’en agace, fronce les sourcils. Comment peut-on se contenter de cette évasion numérique ?
La soif de rêve et de fiction d’Anne semble insatiable. Jamais éteinte, jamais assouvie, elle l’entraîne d’une page à l’autre, d’un livre à l’autre. Elle en oublie ses aller-retours dans des transports mal odorants, bondés, bruyants. Son esprit vagabonde, sautille de mot en mot. Il est libre.
« (…) Malheureusement ce n’était pas seulement par son aspect que différait de la « salle » de Combray donnant sur les maisons d’en face, cette salle à manger de Balbec, nue, emplie de soleil vert comme l’eau d’une piscine, et à quelques mètres de laquelle, la marée pleine et le grand jour élevaient comme devant la cité céleste, un rempart indestructible et mobile d’émeraude et d’or. » Ce soir, comme souvent, Anne manque son arrêt.
Juste parfait, j’aime beaucoup ton texte !
Rhoooo tu me fais rougir ! Merci beaucoup !
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Oh, finalement nous avons été nombreuses à parler de la virtualité de la vie des gens … 🙂 Jolie façon d’inclure un autre récit. 😀
C’est notre quotidien qui nous montre sans cesse des personnes plongées dans leurs téléphones et leurs tablettes dans les transports. Un livre sera toujours mieux que candy crush ! 😉
Un texte vraiment beau! J’adore le fait que les textes soient imbriqués.
Merci beaucoup Amandine, j’avais envie de savoir ce qu’elle lisait !!!
Nous avons eu la même idée, tu invites Proust dans ton récit, j’ai choisi de convier Baudelaire ! Très joli texte.
Oui, ça m’a amusé de lire ton texte et de voir que nous avions la même excellente idée ! 😉
J’ai bien aimé suivre ta lectrice dans sa lecture… et ton texte est parfait, oui, d’une belle fluidité.
Merci beaucoup Antigone, ton commentaire me fait vraiment plaisir !
Que c’est joli ! Et le nombre de fois où ça m’est arrivé !
Bizarrement ça ne m’est jamais arrivé ! En général je continue à lire en sortant du métro ou du bus ! Merci !
On croirait moi 🙂
La lecture plus forte que la réalité ! C’est plutôt bon signe, cela veut dire que les livres que tu lis sont excellents !
je suis comme Anne, capable de râter un arrêt pour une page de plus 😉 Lorsque j’étais étudiante la lecture est ce qui me permettait de monter dans les bus ou les métros bondés ( je suis clautrophobe) et ça fonctionnait !
Comme je le disais plus haut, ça ne m’est jamais arrivé mais je continues à lire en descendant des transports ! C’est une bonne idée pour vaincre ta claustrophobie en tout cas.
De la beauté des mots…
Qui nous ensorcèle et nous entraine bien long de nos soucis quotidiens !
Bravo, c’est un chouette texte tout en finesse ; j’adore !
Merci beaucoup My Name is Or !
Elle est sympathique cette lectrice dans sa bulle. C’est finement observé. Il y a beaucoup de douceur aussi dans ce texte.
Merci beaucoup Cleo ! Je l’envie cette lectrice qui est plongée dans son monde, j’aimerais être à sa place et être en train de lire !
Je me reconnais beaucoup dans cette Anne (2h40 de trajet, ça aide à vouloir s’évader) mais je ne manque jamais mon arrêt, j’ai trop envie de rentrer chez moi 😉
Je suis comme toi, trop pressée de rentrer chez moi pour manquer ma station !
Ne prenant pas les transport en commun, je n’ai pas cette connaissance, je ne sais si je pourrais m’arrêter comme cela, laisser les personnages entre deux portes.
C’est souvent difficile de les laisser dans le bus ou le métro et ça donne une lecture assez hachée finalement.