En ce dimanche 11 septembre, j’ai pu assister à quatre conférences :
- Trois femmes puissantes a réuni Abha Dawesar, Anna North et Cynthia Bond qui toutes trois mettent en scène dans leurs romans des héroïnes qui doivent affronter des difficultés, des situations de crise. Celle de Abha Dawesar, dans « Madison square park », doit faire face à ses parents très traditionalistes et tyranniques, elle est tiraillée entre sa culture d’origine et sa culture d’adoption. Dans « Vie et la mort de Sophie Stark », le personnage central est dans l’incapacité totale de lier des relations avec d’autres personnes, elle lutte contre ses propres démons. Dans les 30’s, Ruby, l’héroïne du roman éponyme de Cynthia Bond, tente d’affronter un passé extrêmement violent dans le sud des États-Unis. Des femmes plus fortes qu’elles ont l’air qui doivent trouver le courage de surmonter leurs problèmes.
- La Nouvelle Orléans avant et après Katrina avec Joseph Boyden, Tom Cooper qui vivent dans la ville et Bernard Hermann qui a réalisé un ouvrage intitulé « Bons temps roulés, dans la Nouvelle Orléans noire disparue 1979-1982 ». La Nouvelle Orléans est restée une ville à multiple facettes, qui change de visage selon les quartiers. Une ville brillante, romantique mais qui peut être également très violente. Les évènements de 2005 n’étaient pas le fruit du hasard mais d’un mépris total de la nature. De nombreuses habitations ont été construites en zones inondables (notamment les habitations des plus pauvres de la ville). Les terres humides, autour de la ville et qui servaient de barrière, d’éponge en cas d’inondation, ont petit à petit été rachetées et détruites par les multinationales du gaz et du pétrole. D’ailleurs Katrina a été suivie d’une terrible marée noire dont le Golfe du Mexique porte toujours les séquelles. 10% de la population noire n’a pu revenir habiter à la Nouvelle Orléans pour diverses raisons. Ils ont été supplantés par les ouvriers sud américains venus reconstruire la ville. La Nouvelle Orléans est totalement gangrénée par la corruption et malheureusement une partie des problèmes n’ont pas été réglés. La discussion était passionnante et les deux écrivains nous ont raconté deux anecdotes incroyables : récemment Tom Cooper a vu une pieuvre sortir des égouts à côté de chez lui ; Joseph Boyden promène toujours son petit chien en laisse car les crocodiles le regardent avec appétit !
- Une vie bouleversée nous présentait les derniers romans de Karen Joy Fowler, Virginia Reeves et David Treuer. L’histoire de celui de Karen Joy Fowler est étonnante puisqu’il s’agit d’une véritable expérience menée par des scientifiques dans les années trente. Il s’agissait de placer un chimpanzé dans une famille et qu’il soit la sœur de la fille de la famille Rosemary. Au cœur de ce roman est la question du langage, de la communication. Pour celui de Virginia Reeves, il s’agit des passions. Nous sommes tous supposés en avoir au moins une. Mais que se passe-t-il lorsque l’on n’en a pas ou que l’on est empêcher de l’assouvir ? C’est le point de départ du roman de Virginia Reeves, qui a d’ailleurs obtenu le prix Page/America 2016, où Roscoe a une passion et une fascination pour l’électricité. Dans le roman de David Treuer, les personnages voient leurs vies bouleversées par la mort d’une jeune indienne Prudence. L’auteur a souligné sa forte empathie avec ses différents personnages. Il s’amuse à jouer avec les clichés, les stéréotypes de l’homme indien. L’auteur est lui-même métisse d’une mère ojibwé et d’un père autrichien. Son personnage masculin est calme, impassible, taiseux et David Treuer cherche à montrer ce qu’il y a derrière le masque.
- La littérature face au terrorisme réunissait Rachel Kushner, Emily St John Mandel et Colum McCann. L’écrivain a un rôle face aux attentats, au terrorisme. Il a l’obligation de dénoncer les mythes créés par la surmédiatisation, de « déromantiser » les terroristes. Il doit également remettre les évènements dans leur contexte et surtout avoir de l’empathie. Le roman doit ouvrir l’esprit des lecteurs en essayant de leur faire comprendre l’autre, de leur faire vraiment voir le monde. Pour Colum McCann, l’écrivain doit écrire avec de la rage, il doit redevenir plus pertinent et apporter du sens, de la compréhension à ses lecteurs. Les trois auteurs présents lors du débat étaient tout à fait intéressant et j’ai trouvé leurs propos particulièrement pertinents.
Et voilà une nouvelle édition du festival America qui se termine et je suis très satisfaite des débats que j’ai suivis pendant les trois jours. J’ai assisté à un peu trop de cafés des libraires, c’est intéressant puisqu’il s’agit essentiellement de présentation des romans mais du coup cela manque de liant. Il serait peut-être préférable de ne pas donner de titre à ces rencontres qui ne sont pas faites pour traiter véritablement un sujet. A part ce petit détail, je trouve le festival toujours aussi formidable et de nombreux ouvrages se sont rajoutés à ma wishlist ! Vivement dans deux ans !
Je n’ai pas eu la chance de pouvoir y aller cette année mais je le note pour l’année prochaine. Merci pour ce compte-rendu
Je te le conseille vraiment, c’est un régal d’entendre parler de littérature pendant tout un week-end.
Je n’ai pas pu y aller cette année, la programmation était pourtant alléchante!! Merci pour ce compte-rendu.
De rien, c’est toujours un immense plaisir de participer à ce festival qui est riche, varié et toujours passionnant.
Tu as bien rempli ta journée ! Ces débats devaient être fort intéressants. Je reconnais quelques tête croisées ici et là, sans toujours pouvoir mettre un nom sur l’auteur. La programmation est riche.
J’en profite toujours au maximum. Je me suis quand même arrêtée à 17h dimanche, après 3 jours j’étais un peu fatiguée ! J’ai découvert de nouveaux auteurs et je suis repartie avec plein d’envie de lectures.
Les débats du dimanche m’attiraient fort! J’ai assisté à un avec Karen J F et l’animateur essayait de ne pas trop en dire…
Là, c’est Karen Joy Fowler elle-même qui a tout raconté ! Du coup, je ne pensais pas en avoir trop dit…désolée !
Ne t’inquiète pas, au débat auquel j’assistais elle a commencé à trop évoquer le sujet (mais ça m’intéressait, tu vois le dilemme), et l’animateur a vite repris les choses en mains. le problème c’est soit on donne le twist, soit on le cache, mais dans ce second cas on rate vraiment l’histoire perso de l’auteur…
C’est vrai que pour expliquer la genèse de son roman, elle est obligée de parler de son père et de la fameuse expérience dont il lui avait parlé.
Dommage qu’on n’ait pas eu l’occasion de se rencontrer!! j’étais à la même conférence que toi, sur la Nouvelle-Orléans, et vu que tu étais très près de la scène, j’ai dû te voir de dos ^^ (est-ce que tu faisais partie des 3 personnes assises à gauche quasiment sur la scène?)
J’ai raté la conférence sur le terrorisme, car 25 minutes après l’horaire théorique de début, elle n’était toujours pas commencée, et je n’en pouvais plus de faire le pied de grue dans le hall étouffant…
Oui, je faisais bien partie des trois personnes presque assises sur les genoux de Joseph Boyden !!! C’est effectivement très dommage de ne nous être rencontrées.
Oui, ils étaient vraiment très en retard pour celle sur littérature et terrorisme mais je n’ai pas regretté l’attente car les trois auteurs étaient passionnants.
Je n’ai pas été emballée par le roman d’ Emily St John Mandel. Qu’est ce qu’elle est jeune!
La thématique de son livre m’intéresse beaucoup et en plus il y a une troupe shakespearienne dedans !!! Je l’ai trouvée très intéressante lors de ce dernier débat.
j’étais aussi au festival mais le vendredi et le samedi – je vois que tu n’étais pas loin d’Eva ! j’ai vu Treuer et Boyden au débat sur la question indienne et c’était ultra passionnant. J’aurais vraiment aimé pouvoir rester le dimanche, je connais bien la Nouvelle-Orléans (j’ai vu Tom Cooper aussi à une autre conférence). Sinon, moi j’ai adoré le roman Station Eleven !! je l’ai fini samedi matin juste avant de voir l’auteure 😉
Le débat sur la question indienne devait être passionnante, j’avais déjà entendu Boyden sur le sujet en 2014 et c’était très intéressant. Malheureusement on ne peut pas être partout ! La conférence sur la Nouvelle Orléans était vraiment bien, j’ai appris beaucoup de choses sur la ville. Merci pour « Station eleven », j’avais très envie de le lire !
Oui il faut malheureusement choisir ! Pour la Nouvelle-Orleans je te crois et j’adore cette ville 😀
Pingback: Le mois américain 2016 – Billet récapitulatif | Plaisirs à cultiver