Après avoir récupéré sa femme à l’aéroport, Joe Rose s’arrête dans un parc pour un pique-nique de retrouvailles. C’est là qu’un terrible incident survient : un aérostat se met à dériver, à descendre dangereusement. Un enfant est à bord. Joe et d’autres hommes présents au parc se précipitent pour essayer de faire atterrir le ballon. Malheureusement, l’un de ces hommes va périr. Mais ce n’est pas l’évènement en lui-même qui va changer la vie de Joe Rose. Parmi les hommes ayant aidé le pilote, Joe croise la route de Jed. Ce dernier devient totalement obsédé par Joe et le harcèle par téléphone, par courrier et il surveille ses allées et venues. Joe perd totalement pied face à cet individu et ne sait plus comment réagir au point de mettre en danger sa vie quotidienne.
Ian McEwan apprécie tout particulièrement ce type de dispositif : il place son personnage dans une situation délicate, perturbante et il observe ses réactions. Comme dans « Samedi », le quotidien du héros est totalement déstabilisé par un évènement extérieur qui finit par tout remettre en cause. L’auteur oppose ici la rationalité de Joe qui écrit des articles sur des publications scientifiques (le protagoniste de « Samedi » était médecin et se raccrochait également à la science face au hasard) et la folie de Jed, fou de Dieu atteint du syndrome de Clérembault. Cette opposition n’est sans doute pas faite avec beaucoup de subtilité. Ian McEwan appuie beaucoup sur l’amour des sciences de Joe et détaille par le menu certaines idées, certains articles. Il en résulte quelques passages assez fastidieux qui ne me semblent pas apporter grand chose à l’intrigue.
En revanche, ce qui est intéressant et parfaitement maîtrisé, c’est le malaise qui s’installe entre Joe et sa femme Clarissa. Celle-ci ne croit pas son mari lorsqu’il lui parle de Jed. Et pour cause, elle ne l’a jamais vu en bas de leur immeuble, Joe a effacé les messages sur le répondeur et l’écriture de Jed ressemble étrangement à celle de Joe. Se met alors en place une très forte et passionnante ambiguïté entre Clarissa et Joe mais également entre Joe et le lecteur. Le roman est effectivement écrit à la première personne du singulier, c’est Joe qui nous raconte les évènements. Faut-il croire tout ce qu’il nous dit ? N’est-il pas comme Clarissa le pense en train de basculer dans la folie ? C’est cette question qui nous tient en haleine, cet inconfort dans notre position de lecteur qui donne tout son intérêt à ce roman.
Comme souvent, « Délire d’amour » souligne le talent de Ian McEwan à instiller le malaise dans la vie de ses personnages et dans les lignes de ses romans. En raison de quelques longueurs, ce livre ne se classera pas parmi mes préférés de l’auteur mais j’ai apprécié son atmosphère chargée d’angoisse et d’ambiguïté.
Aime bcp cet auteur, pas lu celui-ci, je note même si ce n’est pas un de tes préférés !
Si je peux, je lirai tous les livres de Ian McEwan. Comme toi, c’est un auteur que j’apprécie énormément.
Ce que tu en écris me rappelle « Samedi » du même auteur, surtout dans l’instauration d’un malaise qui plane dans tout le roman … Je pense le lire un jour, de toute manière j’ai décidé de lier toute l’œuvre de McEwan.
Oui, c’est ce que j’écrivais dans mon billet, ce roman m’a fait penser à Samedi. Comme toi, je compte bien lire tous les romans de l’auteur qui est vraiment passionnant.
Je crois que Samedi est à ce jour mon titre préféré de Mc Ewan. Je n’ai pas lu celui-ci, mais j’ai bien l’intention de le faire..
C’est vrai que Samedi est une excellent roman, je le préfère à celui-ci.
Je l’ai lu il y a longtemps, et il a fallu que je relise ce que tu en dis pour m’en souvenir ! Ce n’est pas mon préféré, mais c’est bien fait tout de même.
Je pense que tous les romans de Ian McEwan sont tous intéressants. Certains sont un peu moins réussis mais ça reste de la grande littérature.
Pas lu mais j’aime bien McEwan.
C’est un auteur que j’apprécie tout particulièrement aussi.
Je l’avais adoré … Même pas vu les longueurs … Et la scène initiale, la chute de l’aérostat Whouah !!! du grand art …
Je suis d’accord avec toi sur le début du roman, c’est exceptionnel et la construction est incroyable.
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