A l’approche de Noël de 1985, à New Ross en Irlande, Bill Furlong fait le plein de commandes puisqu’il est propriétaire du dépôt de bois et de charbon. Il a travaillé dur pour en arriver là et il continue à faire lui-même les livraisons. C’est lors de l’une d’elle que le cours de sa vie va être modifier. Bill se rend au couvent du Bon Pasteur qui enferme un collège technique pour filles et une blanchisserie. Dans une chapelle, il croise des jeunes filles s’acharnant à nettoyer le sol. L’une d’elles interpelle Bill et lui demande de l’emmener à la rivière pour qu’elle puisse s’y noyer. Une scène qu’il ne parvient pas à oublier.
Claire Keegan se fait rare en littérature et chacun de ses livres n’en est que plus précieux. « Ce genre de petites choses » l’est sans conteste tant ce texte est ciselé, précis, sans un mot ou une virgule de trop. Claire Keegan évoque un thème que l’on retrouve régulièrement dans la littérature ou le cinéma irlandais, celui des blanchisseries de Magdalene (si vous ne l’avez pas vu, je vous conseille le formidable film de Peter Mullan « The Magdalene sisters » sorti en 2002). Les filles-mères y étaient exploitées et maltraitées. Bill, qui mène une vie paisible avec sa femme Eileen et leurs cinq filles, ne peut oublier ce qu’il a vu au couvent. Cette épisode le replonge dans ses propres racines. Sa mère l’a eu à l’âge de 16 ans et elle n’a pas été envoyée dans un couvent grâce à la bienveillance de la femme chez qui elle travaillait. Que serait devenu Bill sans cette personne ? Et si cela arrivait à l’une de ses filles ? La scène du couvent se transforme en cas de conscience et fait ressortir toute l’humanité de Bill. Pourtant agir n’est pas si simple, la société et sa propre femme le mettent en garde contre le poids incommensurable de l’Eglise sur leur petite ville. Ce qui est très intéressant dans ce roman, c’est le choix du regard masculin de Bill sur la situation de ces jeunes filles et qui nous offre un nouvel éclairage.
« Ce genre de petites choses » s’attache, avec justesse et une écriture limpide, au chemin d’un homme ordinaire placé devant un choix difficile qui peut bouleverser sa vie. Un roman bref et remarquable.
Traduction Jacqueline Odin
en effet,le point de vue a l’air intéressant!
Encore une fois, Claire Keegan nous offre un très, très beau roman.