
La douzième édition du mois anglais vient de se terminer et, sur les onze livres prévus au départ, j’ai pu en lire dix. Il me reste uniquement à relire « Raison et sentiments » de Jane Austen, ce que j’espère faire cet été. Mes lectures furent variées et excellentes dans l’ensemble. Mon grand coup de cœur du mois va « Au retour du soldat » de Rebecca West, un bijou de délicatesse et d’une grande profondeur. Encore un grand merci à ma chère Lou avec qui j’ai toujours plaisir à organiser ce mois anglais et aux nombreux participants.
Et côté cinéma, j’ai eu l’occasion de voir six films dont mon préféré est le suivant :

1970-72, Madagascar, les militaires français sont toujours là alors que l’île est indépendante depuis 1960. Thomas et sa famille y vivent dans une sorte de paradis illusoire. Les militaires font comme si leur présence allait de soi alors que la révolte gronde. C’est la fin d’une époque que montre Robin Campillo qui s’inspire ici de son enfance. Ce qui est très réussi dans son film, c’est que l’histoire nous est racontée à hauteur d’enfant. Thomas voit et entend tout (dans sa caisse de déménagement dans le jardin, derrière la porte en verre dépoli de la cuisine) même s’il ne comprend pas toujours les situations auxquelles il assiste. Des séquences très amusantes, mettant en scène son héroïne préférée Fantômette, montrent que l’imaginaire du garçon est déjà en marche.
Mais le film n’est pas que le récit de la fin de l’occupation coloniale à Madagascar, c’est également le récit de la fin d’un couple, de l’émancipation de la mère de Thomas. « L’île rouge » est un film vibrant sur le souvenir, sur l’émancipation et la naissance d’un cinéaste.
Et sinon :
- « Fifi » de Jeanne Aslan et Paul Saintillan : Fifi vit dans une famille pauvre et totalement dysfonctionnelle. Pour s’évader de ce quotidien pesant, elle s’installe dans la maison vide d’une copine partie en vacances avec ses parents. Mais le frère aîné de la copine revient passer l’été à Nancy. Le premier film de Jeanne Aslan et Paul Saintillan est plein de charme et de délicatesse. Rien de spectaculaire dans ce film, seulement des moments partagés entre l’adolescente et le jeune homme indécis dont tous deux se souviendront longtemps. Pour interpréter cette jolie partition, deux jeunes comédiens qui m’ont déjà impressionnée dans d’autres œuvres : Céleste Brunnquell (En thérapie) et Quentin Dolmaire (OVNI(s)).
- « Le processus de paix » de Ilan Klipper : Marie et Simon ont deux enfants, une vie bien installée socialement. Elle anime une émission de radio de sexologie féministe pendant que lui enseigne le conflit israélo-palestinien à l’université. Tout devrait aller pour le mieux mais ils ne se supportent plus. Voilà une comédie française réussie aux dialogues vifs, aux situations cocasses et qui ne prend pas ses spectateurs pour des idiots. La qualité du casting est à la hauteur : Camille Chamoux, solaire et volontaire, Damien Bonnard, lunaire et angoissé. Et les seconds rôles sont tous soignés : Ariane Ascaride en mère juive déjantée, Jeanne Balibar totalement libérée, Quentin Dolmaire, jeune stagiaire que rêve de croquer Jeanne Balibar.
- « Sick of myself » de Kristoffer Borgli : Signe est serveuse dans un café. Son petit ami est un artiste à l’ego démesuré qui ne cesse de tirer la couverture à lui. Mais il n’est pas le plus égotiste des deux. Signe est prête à tout pour connaître son heure de gloire. Elle multiplie les tentatives pour attirer l’attention et trouve enfin ce qui va la rendre célèbre : elle prend des médicaments qui vont la défigurer, ce qu’elle fera passer pour une maladie de peau. Le film de Kristoffer Borgli est tout à fait dans l’esprit de Ruben Östlund : excessif, cruel et surtout critique envers notre époque égocentrique. C’est un véritable jeu de massacre entre Signe et son petit ami, les dialogues sont cinglants. Le couple est le lieu de toutes les bassesses comme le montrait également Ruben Östlund dans « Snow therapy ». C’est décapant comme les scandinaves savent si bien le faire.
- « Wahou » de Bruno Podalydès : Le dernier opus de Bruno Podalydès est un film à sketches autour de deux agents immobiliers interprétés par Karine Viard et Bruno Podalydès himself. Tout se déroule autour de deux biens : un appartement moderne à louer dans « le triangle d’or de Bougival » et l’autre est une belle maison bourgeoise avec au fond du jardin la ligne de RER. Comme toujours chez le réalisateur, le film est drôle et plein de tendresse pour ses personnages (mention spéciale au couple fantasque joué par Sabine Azéma et Eddy Mitchell). C’est bien écrit, bien interprété, tout cela nous donne une comédie charmante avec une pointe de nostalgie.
- « Indiana Jones et le cadran de la destinée » de James Mangold : cinquième et dernier volet des aventures de notre archéologue préféré, cet opus revivifie le mythe avec un film rythmé par de nombreux rebondissements, rempli de clins d’œil aux films précédents et une Phoebe Waller-Bridge malicieuse et ironique. Une durée de deux heures aurait sans doute été suffisant mais ne boudons pas les adieux de l’un des personnages les plus sympathiques d’Hollywood.
C’est un bilan vraiment impressionnant !