Copenhague de Pandolfo et Risbjerg

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Suite à un burn out, Nana Miller quitte Paris pour Copenhague. Elle pense y rester une semaine mais un corps a été retrouvé dans le port. Mais il ne s’agit pas de n’importe quel corps puisque c’est une sirène qui s’est échouée. Le Danemark est en deuil et le pays est bouclé. L’heure est grave : « Quelque chose de précieux a été perdu, on a touché à un trésor national, à notre cœur, à notre poésie, à notre enfance à tous. » Nana ne peut plus rentrer chez elle où l’attend sa fille de 14 ans. Dans l’hôtel où elle réside, elle fait la connaissance du volubile et sympathique Thyge Thygesen. Il est accompagné d’un splendide caniche rose appelé Nom d’un chien. Pour pouvoir rentrer chez elle, Nana ne voit qu’une solution : résoudre le mystère de la mort de la sirène. Elle entraine dans son aventure Thyge et Nom d’un chien. Au travers des rues de Copenhague, ils vont poursuivre leurs recherches tambour battant croisant un club de propriétaires de caniches, une secte inquiétante, une fanfare dépressive et la reine.

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Quel régal de plonger dans les pages de la bande-dessinée de Pandolfo et Risbjerg ! J’ai eu plaisir à retrouver la capitale danoise que j’avais visitée l’année dernière, même si la sirène a un peu changé de position…je vous laisse la découvrir. L’enquête de Nana et Thyge est décalée, proche du conte et pleine de fantaisie. Le trait est vif, extrêmement dynamique comme le montre une incroyable et spectaculaire course-poursuite dans les jardins de Tivoli. Les personnages virevoltent d’une case à l’autre ! Ils sont d’ailleurs très attachants avec une mention spéciale pour Thyge au français approximatif et aux tenus colorées.

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Réjouissante, loufoque, drôle et tendre « Copenhague » m’a totalement conquise et j’ai passé un excellent moment aux côtés de Nana, Thyge et Nom d’un chien !

Rose à l’île de Michel Rabagliati

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Après le décès de son père et la séparation d’avec sa femme, Paul avait besoin d’un grand bol d’air. Il part donc en vacances avec sa fille, Rose, âgée de 23 ans, sur l’île verte dans l’estuaire du Saint Laurent. Ils y ont loué un petit chalet, loin de tout et niché au cœur de la forêt. Ce sont leurs premières vacances en tête-à-tête et cela va leur permettre de se retrouver mais aussi de se balader à la découverte de l’île.

Après la série des Paul (que je n’ai pas encore terminée), Michel Rabagliati nous offre avec « Rose à l’île » son premier roman illustré. Cette forme libère le dessinateur, lui redonne un nouveau souffle. Le paysage s’étire, s’épanouit dans les pages du livre, loin de la rigueur des cases. Même chose pour le texte qui s’affranchit de la forme courte des bulles. La nature console et répare, tout comme les relations amicales imprévues. Michel Rabagliati illustre avec beaucoup de minutie et de précision la faune et la flore de l’île. On sent sa délectation à dessiner ce qui l’entoure.

En plus des thématiques récurrentes chez l’auteur, comme la solitude ou le vieillissement, il questionne également la création et son inspiration. Il sent que celle-ci s’assèche, que l’autofiction n’est pas la seule voie possible pour s’exprimer. Son séjour sur l’île lui laisse entrevoir d’autres possibilités de création.

La poésie, la douceur des paysages, la simplicité des relations avec les autres, l’humour, tout concourt sur l’île verte à apaiser Paul. Malgré la mélancolie qui transparait par moments, « Rose à l’île » est lumineux et particulièrement savoureux.

Les pizzlys de Jérémie Moreau

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Nathan, un jeune parisien, est chauffeur Uber et il s’épuise au volant pour subvenir aux besoins de sa famille. Il élève seul sa sœur Zoé et son frère Étienne suite au décès soudain de leur mère. Un jour, il prend en charge Annie, une vieille femme qui se rend à l’aéroport pour rejoindre sa terre natale, l’Alaska. Voilà quarante ans qu’elle l’a quittée pour vivre à Paris. Nathan s’endort au volant pendant sa course et provoque un accident. Personne n’est heureusement blessé mais la voiture est inutilisable. Le jeune homme n’avait même pas fini de la payer. Il sombre dans le désespoir et son avenir semble sans issue. Annie lui propose une porte de sortie surprenante : la fratrie va venir avec elle en Alaska le temps que Nathan remette sa vie et ses idées en place. Entre les jeux vidéos et leurs téléphones, Zoé et Étienne ne sont pas emballés par l’idée d’être coupés du monde au fin fond de l’Alaska.

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Jérôme Moreau nous donne à lire avec « Les Pizzlys » une fable écologique où les mythes et légendes sont très présents. Nathan, Zoé et Étienne se reconnectent à la nature, aux animaux notamment par le biais de leurs rêves. Le fantastique habite cette terre ancestrale. Mais l’Alaska n’est pas qu’une terre rêvée, elle est frappée par le changement climatique. Annie ne retrouve pas le village où elle a grandi. Les hommes ont déserté le lieu. La fonte des glaces modifie les paysages, les oiseaux migrateurs partent deux mois en avance, les grizzlys et les ours polaires s’accouplent pour donner des pizzlys.

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Ce qui fait la force et l’originalité de cette bande-dessinée est son travail sur la couleur. Rose, vert, violet dominent l’ensemble, des couleurs d’aurore boréale qui renforcent le côté onirique de l’intrigue. Cela donne des pages plastiquement magnifiques qui captivent le regard.

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« Votre « homme » a marché sur la lune, mais il ne sait plus habiter la terre« , c’est ce que Jérémie Moreau veut nous montrer dans sa bande-dessinée où il aborde le thème de l’écologie, d’un retour à la nature. Son travail graphique, surtout le choix des couleurs, m’a totalement séduite.

Trois chardons de Cécile Becq

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Ile de Skye, juin 1933, Moira Ferguson enterre son mari mort brutalement. A 30 ans, elle se retrouve sans ressources avec deux jeunes enfants. Sa sœur aînée Margaret propose de l’accueillir dans sa ferme le temps d’y voir plus clair. Bientôt, leur sœur cadette Effie va les rejoindre. Séduisante et pétillante jeune femme, elle vient d’apprendre que son mari médecin l’avait trompée. Elle quitte Edimbourg pour les terres sauvages et rudes de Skye. Les trois sœurs vont devoir cohabiter alors qu’elles ont des caractères fort différents. La frivolité d’Effie entrera souvent en conflit avec la rusticité de Margaret. Cette dernière n’a que sa ferme comme moyen de subsistance et ne peut nourrir toute la famille. Moira devra donc se mettre à travailler tout en essayant de continuer à vivre. La rigueur du climat, l’isolement de leur cottage, les difficultés vont néanmoins les rapprocher et les souder à nouveau.

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J’ai découvert cette BD grâce à Emjy et j’en ai beaucoup apprécié la lecture. L’intrigue est classique, mais elle est maîtrisée. Cécile Becq a su parfaitement doser la place, le caractère des trois sœurs, ainsi que le côté dramatique de leur situation. Les trois sœurs sont éminemment attachantes et j’ai pris plaisir à les suivre, à découvrir les événements qui ont jalonné leurs vies. La BD est très ancrée dans le quotidien des trois sœurs et des habitants de l’Ile de Skye. D’ailleurs, celle-ci est magnifiquement rendue par les dessins de Cécile Becq. Ils sont à la fois emprunts de douceur et très colorés.

« Trois chardons » nous raconte une histoire lumineuse de sororité, de retrouvailles, d’apprentissage, d’adaptation à une vie nouvelle sur fond des somptueux paysages écossais.

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Brontëana de Paulina Spucches

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Après nous avoir offert une formidable bande dessinée sur Vivian Maier, Paulina Spucches a choisi de se pencher sur les sœurs Brontë après un voyage à Haworth. « Brontëana » s’intéresse plus particulièrement à Anne dont les deux romans, « Agnès Grey » et « La recluse de Widfell Hall », sont malheureusement méconnus. Emily et Charlotte font de l’ombre à leur cadette qui mérite pourtant d’être lue. Dans les premières pages de sa bande dessinée, Paulina Spucches nous rappelle à quel point « La recluse de Widfell Hall » avait fait scandale lors de sa publication (la perversité de son auteur, la mauvaise influence que le roman pourrait avoir sur les femmes). Pour redorer le blason de sa sœur, Charlotte la présenta après sa mort comme très lisse et vertueuse et sans doute participa-t-elle à son invisibilisation.

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Paulina Spucches redonne vie à Anne Brontë entre les pages de sa bande dessinée. Elle montre à quel point son imaginaire n’avait rien à envier à celui de ses aînées. On la voit chercher à s’affirmer face aux fortes personnalités de ses frère et sœurs et vouloir devenir indépendante économiquement. Derrière les splendides dessins à la gouache, on sent une documentation très poussée et très solide. Mais c’est bien une vision personnelle de la famille Brontë que nous propose la dessinatrice. Les landes sont ici flamboyantes, elles sont une explosion de couleurs vives loin de la noirceur des romans gothiques. J’ai particulièrement aimé le rapprochement entre Anne et un corbeau, loin de son image fragile, qui nous offre une magnifique illustration d’Anne dans une robe violette et rouge recouverte de plumes sombres. Le découpage des pages est également très réussi et très original.

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Avec sa deuxième bande dessinée, Paulina Spucches s’impose comme une illustratrice de talent, à l’univers singulier et éclatant. Je salue son choix de remettre en lumière à travers son travail deux artistes qui restèrent longtemps dans l’ombre. Sa vision des sœurs Brontë m’a totalement séduite et je ne peux que vous encourager à lire les deux romans d’Anne Brontë si ce n’est pas déjà fait.

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Pisse mémé de Cati Baur

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Marie, Nora et les jumelles Marthe et Camille imaginent un soir, où elles ont pas mal bu, ouvrir un bar à tisanes qui s’appellerait « Pisse mémé ». L’endroit aurait également un coin librairie et proposerait des ateliers notamment de yoga. Un coup de pouce du destin va leur permettre de de réaliser leur rêve. Mais concrétiser « Pisse mémé » n’est pas si simple et changer de vie est un grand saut dans le vide pour les quatre amies.

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La dernière bande-dessinée de Cati Baur est absolument réjouissante. Les jeunes femmes ont des personnalités bien dessinées, bien tranchées et elles se complètent parfaitement dans leur projet. Leur amitié fait plaisir à voir. Et même si l’esprit de la BD est très positif, Cati Baur ne cache pas les difficultés rencontrées par certaines (plusieurs petits boulots pour s’en sortir, burn out, etc …). Cela ne les rend que plus sympathiques et on espère que l’ouverture de leur bar va leur permettre de connaître une vie meilleure.

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J’ai découvert Cati Baur grâce à son adaptation des « Quatre sœurs » de Malika Ferdjoukh. C’est un immense plaisir de retrouver la douceur de son dessin, le peps de ses couleurs. Il y a beaucoup de tendresse envers ses personnages. J’ai été totalement conquise par les quatre amies qui pétillent de malice et de drôlerie. Et j’aimerais avoir à côté de chez moi un Pisse mémé aussi chaleureux et convivial.

Vivian Maier, à la surface d’un miroir de Paulina Spucches

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J’ai découvert Vivian Maier en 2013  grâce au documentaire de John Maloof et Charlie Siskel. Ses extraordinaires photos, son sens du cadrage et son énigmatique personnalité m’ont tout de suite fascinée. J’avais donc très envie de découvrir la bande dessinée  que lui a consacrée Paulina Spucches. J’ai beaucoup apprécié le procédé narratif choisi par la dessinatrice. Elle prend comme point de départ des photos de Vivian Maier qu’elle transpose en dessin. Elle en imagine ensuite le contexte et ainsi elle évoque des souvenirs dans la vie de la photographe. C’est donc par fragments, par petites touches que se dévoile la vie de Vivian Maier : son métier de nounou, son retour à New York après avoir passé des années en France, son retour à Champsaur, sa manie d’accumuler les journaux, son côté secret et mystérieux, la manière dont ses pellicules ont été découvertes après sa mort. Paulina Spucches met également en valeur la transmission de la photographie : de Jeanne Bertrand à Vivian Maier et de cette dernière à Gwen Ward, une enfant dont elle fut la nounou. L’idée est joliment séduisante, même si elle est en partie fictionnelle.

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Le mélange entre réalité et fiction est très réussi dans cette bande dessinée de Paulina Spucches, comme le sont également ses gouaches et aquarelles aux traits rapides. Les couleurs sont vives, flamboyantes et vibrantes.

Dans « A la surface d’un miroir », Paulina Spucches a choisi de raconter de manière elliptique la vie de la photographe Vivian Maier. Ses choix narratifs, les couleurs vives employées m’ont séduite. J’ai maintenant hâte de découvrir son prochain projet autour des sœurs Brontë.

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La dernière reine de Rochette

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Edouard Roux a grandi dans les montagnes du Vercors, il y a vécu seul avec sa mère. Leur isolement dans la forêt leur attire la malveillance des villageois. En 1916, Edouard revient de la guerre avec une grande partie du visage arrachée. Il porte un sac sur la tête à la manière d’Elephant man et il se refusera à revoir sa mère. Un autre soldat à la gueule cassée lui conseillera de faire appel au talent de Jeanne Sauvage, une sculptrice animalière qui crée des masques pour les hommes revenus défigurés de la guerre. Edouard quitte Grenoble pour Paris où il rencontre Jeanne. Elle lui sculpte un masque et lui rend sa dignité. Tous  deux tombent amoureux et finissent par s’installer dans le massif du Vercors.

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« La dernière reine » de Rochette est une bande dessinée riche et passionnante. Le cœur de l’album est la belle et émouvante histoire d’amour de deux personnages venues d’univers totalement différents. Avec Jeanne, Rochette nous plonge dans le bouillonnement artistique du Paris des années 20. On croise Soutine, Cocteau, Picasso, Pompon. Une critique des galeristes et du monde de l’art se glisse à ce moment dans les pages de la bande dessinée. De l’autre côté, il y a les montagnes tant aimées par Edouard. Ce milieu naturel qui le protège des autres et qu’il respecte. Rochette propose une histoire du massif du Vercors qui commence en -100 000 avant J-C. Avec ses pages, c’est la rapport des hommes à la nature sauvage, aux animaux qui l’habitent (surtout l’ours) qui se dessine. On voit l’homme s’en éloigner et vouloir la maîtriser, la détruire.

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La tonalité de « La dernière reine » est globalement sombre, Edouard est devenu misanthrope pour se protéger des autres mais son refuge naturel ne suffira pas. Le trait brut, les couleurs  froides et sombres reflètent parfaitement l’atmosphère de l’histoire.

« La dernière reine » est une bande dessinée qui brasse des thématiques variées, la construction est très maitrisée et le propos est captivant.

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Le jardin secret seconde partie de Maud Begon

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C’est avec grand plaisir que nous retrouvons Mary, Dickon et Colin dans ce tome 2 du « Jardin secret » de Maud Begon d’après le roman de Frances H. Burnett. A la fin du premier tome, Mary venait de découvrir l’existence de son cousin Colin. Le jeune garçon souffreteux est persuadé qu’il va bientôt devenir bossu et mourir.  Il vit comme un reclus dans sa chambre et ne voit même pas la lumière du jour. Mais Mary a bien l’intention de changer cela et d’empêcher son cousin de se morfondre et de s’apitoyer sur son sort. Sous prétexte d’être mourant, Colin est un véritable tyran qui terrorise tout le personnel du manoir. Mary a constaté sur elle tous les bienfaits de la nature et de la découverte du jardin secret qu’elle a décidé d’entretenir avec son ami Dickon. Le grand air, le printemps et son explosion de couleurs et d’odeurs ne peuvent que mettre fin aux caprices du jeune Colin.

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Le tome 2 est, comme le premier, un régal pour les yeux. La nature s’épanouit dans les pages de Maud Begon, elle déborde du cadre et nous enchante totalement. Chaque page se déroulant dans le jardin est une merveille de délicatesse, une profusion de verdure et de fleurs. J’aurais bien aimé accompagner les trois amis dans ce jardin splendide ! Le dessin de Maud Begon est toujours aussi doux, frais et elle sait rendre les enfants extrêmement expressifs et attachants.

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Tout est absolument adorable et charmant dans cette bande dessinée. L’histoire, les dessins sont lumineux et soulignent à quel point notre capacité d’émerveillement face à la nature est salutaire.

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Un chant de Noël, une histoire de fantôme de José Luis Munuera

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Londres, 24 décembre 1843, Elizabeth Scrooge, prêteuse sur gage, exècre les fêtes, la joie et la bienveillance qui les accompagnent. Misanthrope, égoïste, radine et solitaire, Elizabeth Scrooge ne supporte personne et n’a aucune empathie pour les autres. Son entourage proche est traité de la même façon que les miséreux qui peuplent les rues de Londres. Son commis Cratchit lui arrache l’autorisation de ne pas travailler le jour de Noël mais ça sera bien entendu à ses frais. Sa nièce Frédérique lui propose de venir chez elle pour Noël ce qu’Elizabeth rejette avec brutalité. Pourtant, cette nuit du 24 décembre va bouleverser la vie d’Elizabeth Scrooge.

Vous avez bien lu, Scrooge s’appelle Elizabeth et non plus Ebenezer. José-Luis Munuera conserve la trame, les personnages du célèbre conte de Charles Dickens tout en le modernisant. Scrooge reste ce personnage antipathique au cœur sec. Mais le fait qu’il soit une femme modifie le regard que l’on porte sur lui. Elizabeth a été forcée d’arrêter l’école pour s’occuper de son père veuf et acariâtre. La place de la femme à l’époque victorienne est au foyer. Mais Elizabeth va réussir à déjouer les attentes de la société pour devenir une femme indépendante, ambitieuse et non soumise à un mari ou des enfants. Elle l’explique à la femme de Cratchit : « Dans ce monde, une femme n’a que peu d’options. En réalité, elle n’en a que deux. Être une sainte…ou une sorcière. » Elizabeth a bien entendu choisi la deuxième option et elle l’assume totalement. Elle est coriace et ne se laisse pas impressionner par les esprits de Noël, ni par Dieu. Scrooge a ici plus de nuances et la morale du conte n’est pas aussi nette que chez Dickens.

L’histoire est servie par un dessin splendide, les décors notamment, urbains et enneigés, sont particulièrement réussis. Les passages fantastiques sont à la hauteur de ce que Dickens a imaginé et sont saisissants.

La relecture du conte de Noël de Charles Dickens par José-Luis Munuera est savoureuse et pertinente. Elle interroge la place de la femme à l’époque victorienne et nous présente un personnage au fort caractère qui n’a pas l’intention de se renier. Un personnage qui est finalement moins détestable que son double masculin. Une très belle bande dessinée au graphisme remarquable.