En un monde parfait de Laura Kasischke

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Jiselle est hôtesse de l’air et a plus de trente ans, elle est encore célibataire. Elle croise le chemin de Mark Dorn, le plus beau et le plus convoité des pilotes. Père de trois enfants et veuf depuis de nombreuses années, il n’était pas décidé à refaire sa vie jusqu’à ce qu’il tombe amoureux de Jiselle. Il la demande en mariage rendant ainsi le sort de Jiselle enviable aux yeux des autres hôtesses de l’air. Mais Mark cherche avant tout une mère pour ses enfants. Jiselle doit donc arrêter de travailler et part vivre dans la maison de son mari au fin fond du Wisconsin. Elle est immédiatement en butte à l’hostilité et aux remarques désobligeantes de ses belles-filles. Jiselle n’était pas préparée à être mère et encore moins belle-mère. D’autant plus que son mari est très souvent absent et la laisse se débrouiller avec sa progéniture. L’existence de la famille va basculer, comme l’ensemble des États-Unis, lorsqu’une terrible épidémie de grippe va frapper le pays.

Laura Kasischke a l’art de plonger ses personnages dans des situations apocalyptiques. L’histoire de Jiselle semble commencer comme un conte de fées. Elle épouse le prince charmant et vit heureuse pour le restant de ses jours. Le prince charmant est en fait loin de répondre aux espérances de sa princesse en l’abandonnant sans cesse. Ajouter à ça une terrifiante épidémie qui décime le pays et le conte de fées de Jiselle vire au cauchemar le plus noir. La grippe transforme les États-Unis, pays tant convoité et copié, en ennemi pour le reste du monde. Les américains ne peuvent plus voyager ou rentrer chez eux, comme Mark coincé à Berlin au moment du début de l’épidémie. La société américaine vacille et c’est le chaos qui s’installe : « Les coupures d’électricité, les pénuries et la hantise de la grippe avaient apparemment incité une partie de la population à s’écarter de la moralité traditionnelle pour vivre l’instant. Toxicomanie et promiscuité sexuelle connaissaient, disait-on, une vague sans précédent parmi les jeunes. » On cherche des responsables, des boucs-émissaires et les idées les plus farfelues émergent de cette folie ambiante.

Tout l’intérêt et l’enjeu du roman est de voir comment Jiselle va réagir face à cette situation catastrophique, comment elle va s’adapter au retour à la vie primitive. Et comment Jiselle va réussir, malgré tout, à écrire son propre conte de fées et à s’affirmer comme femme. Son obstination à la douceur, à la gentillesse finira par faire surgir de la lumière dans ce tableau si sombre.

Laura Kasischke excelle à décrire le chaos, le monde qui se délite. « En un monde parfait » est un drôle de conte où la princesse trouvera de la force dans l’adversité. Toujours étrange, toujours originale, Laura Kasischke est décidément un immense écrivain.

18 réflexions sur “En un monde parfait de Laura Kasischke

  1. J’ai lu un seul livre de cet auteur, Esprit d’hiver, et je me souviens encore avec précision de cette histoire glauque qui colle à la peau. Je ne sais pas si je me laisserai tenter de si tôt par un autre de ces romans. Pourtant, ce que tu dis là me tente (notamment le fait que l’héroïne réussisse malgré tout à trouver son chemin).

      • J’ai beaucoup aimé aussi Les revenants et La couronne verte, plus proches de romans de campus. Je me souviens moins de ses premiers A Suspicious river et Un oiseau blanc dans le blizzard, mais ils étaient très bien aussi.

  2. J’ai aimé ce roman, le seul pour l’instant que j’aie lu de cette auteure. Je trouve qu’elle rend très bien l’ambiance et les questionnements de Jiselle.

    • Laura Kasischke est vraiment douée pour mettre en place des ambiances atypiques, c’est ce que j’admire le lus chez elle. Ses intrigues sont toujours étonnantes, intrigantes.

  3. J’avais moyennement aimé Esprit d’hiver où j’avais trouvé tout avant la fin mais j’ai un autre roman de l’auteur dans ma PAL. Tu me donnes envie de retenter le coup 🙂

    • Tu es trop forte ! Je n’avais absolument rien vu venir en lisant Esprit d’hiver que j’avais adoré. J’espère que tu seras plus heureuse avec le prochain.

  4. Je n’ai pas le souvenir de l’avoir terminé, et je suis en train de me demander pourquoi en lisant ta chronique 😉

    • Laura Kasischke divise les lecteurs, tout le monde n’aime pas. Ce n’est que mon deuxième mais je crois que je suis nettement dans le camp des pour !

  5. J’ai entamé et toujours pas réussi à terminer un autre roman d’elle, A Suspicious river, et il m’a tellement ennuyée que ça m’a vaccinée de lire d’autres romans de cette auteure. Pourtant, tu réussis à me donner envie avec celui-ci ! La thématique apocalyptique est intéressante, et ce roman a l’air moins lent que A suspicious river… A voir !

    • Je n’ai pas lu celui qui te fait bloquer, ce n’est que mon deuxième et j’aime beaucoup les atmosphères qu’elle met en place. Cet auteur continue à m’intriguer.

    • C’est le côté apocalyptique qui t’inquiète ? Si ça peut te rassurer, Jiselle s’en sort très bien, ça lui réussit plutôt le dépouillement et la coupure du reste du monde. C’est loin d’être aussi noir qu’Esprit d’hiver.

  6. J’avais beaucoup aimé cet opus. La manière qu’à Kasischke de traiter les changements, ses images de la nature forte et sanglante, ses non-dits… je suis fan !

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