« Quelque chose de pesant, d’angoissant flottait dans l’air de l’appartement. Quelque chose de tellement épouvantable et sinistre qu’on aurait voulu hurler de terreur, comme si des fauves inconnus se tenaient aux aguets quelque part aux environs, prêts à bondir, avides de sang frais et de tiède chair humaine. » Une maison, la neige, l’horloge qui égrène les heures inexorablement, quatre membres tourmentés d’une famille : le père Tumas qui passe ses soirées à jouer, la mère Magda obsédée par sa beauté et sa peur de vieillir, Poupée la jeune nymphette insolente et Petit qui cherche à attirer l’attention des uns et des autres désespérément. Beaucoup d’indifférence, de tension se développe entre les murs de la demeure familiale. Beaucoup de rancœur entoure un autre personnage : Robert, ami d’enfance du père et amant de la mère. Et le drame survint.
« Seul l’assassin est innocent » de Julia Székely est un petit roman très étonnant. L’auteur prend plaisir à faire perdre ses repères au lecteur. L’époque, le lieu sont indéterminés. On se situe probablement dans la première partie du 20ème siècle, peut-être à l’époque où il a été écrit, c’est-à-dire vers 1940. Les personnages sont par moments également plongés dans le flou et l’incertitude. Ils ne sont pas toujours nommés, à nous de nous y retrouver. Le lecteur est donc un peu mal à l’aise, mis dans une posture inconfortable. Cela ne fait que renforcer l’ambiance oppressante, étrange de ce drôle de roman policier.
Toute l’intrigue se déroule sur une seule journée et presque entièrement dans la demeure familiale où se nouent et se dénouent les fils de ce drame. Ce livre m’a évoqué la manière dont George Simenon pouvait écrire ses romans noirs notamment en raison de l’importance donnée à l’atmosphère d’un lieu et de la manière froide avec laquelle est traitée la psychologie des personnages. Il y a un côté entomologiste dans la façon qu’a Julia Székely d’épingler les travers de ses personnages et de mettre au jour leurs faiblesses. A la famille, il faut ajouter un savoureux lieutenant de police, auteur sous pseudo de romans policiers. Toujours partagé entre ses deux activités, il analyse les situations à l’aune de ce qu’il pourrait en faire sur le papier, attristé par la réalité et excité par la possibilité de fiction.
Il faut accepter de se perdre un peu pour profiter de ce surprenant petit roman policier de Julia Székely qui nous sort des sentiers battus.
Un grand merci aux éditions Phébus pour cette découverte.
Rien que le titre, déjà, donne envie, je trouve… 🙂
Et ton article aussi !
Je dois avouer que ce sont le titre et la couverture qui m’ont attirée ! Je ne savais pas à quoi m’attendre et c’est vraiment surprenant comme manière d’écrire.
Très tentant ! Je n’en ai pas du tout entendu parler mais c’est noté !
Malheureusement, les éditions Phébus ne sont pas assez dans la lumière alors qu’ils publient toujours une littérature de qualité.
ouh la la, je ne suis pas certaine que ce soit ce qu’il me faut en ce moment, de ce que je lis à demi-mots me fiche plus la frousse qu’autre chose…
Du coup, c’est une réédition d’un texte d’avant guerre ?
Il a été publié en 1941 mais je ne pense qu’il y ait eu une traduction française à l’époque. Je ne suis pas sûre non plus qu’il te plairait, c’est très sombre comme intrigue.
Intriguée je suis, tentée aussi, mais est-ce bien raisonnable dans mon cas ??? 😆
Tu peux y aller, je ne fais pas de mois hongrois !
Oh, dommage ;-))
Merci pour ta présentation; je le note avec avidité !
Si tu le lis, il faudra que tu me dises ce que tu en as pensé.
Les huis clos me laissent souvent perplexe. Mais ta chronique est une belle invitation à passer outre mes réticences…
Merci, je dois avouer que contrairement à toi j’aime assez les huis clos ! Cela donne toujours des situations étouffantes, explosives.
Le titre est savoureux, déjà 😉
Le titre est effectivement excellent et particulièrement intrigant.
Je ne suis pas certain d’avoir envie de m’y perdre…
Je reconnais qu’il n’est pas si facile à aborder mais comme il est court on ne se perd pas très longtemps ! 😉