Les Graciées de Kiran Millwood Hargrave

9782221239261

En 1617, à la veille de Noël, une terrible tempête s’abat sur l’île de Vardø, au nord du cercle polaire. Quarante marins sont emportés par la mer déchaînée. Leurs femmes, leurs filles regardent le désastre depuis la terre ferme. Les corps ne seront rejetés par les vagues que plusieurs jours plus tard. La petite communauté a presque perdu la totalité de ses hommes. Les femmes se mobilisent pour subvenir à leurs besoins : pêcher, élever les rennes, ensemencer les champs tout en continuant à s’occuper des tâches ménagères et des enfants. Un certain équilibre s’installe jusqu’à l’arrivée du seigneur John Cunningham. Il envoie un délégué, Absalom Cornet, pour surveiller la communauté de femmes et les ramener dans le droit chemin. Peu à peu, le délégué instaure un climat de terreur et de délation. Absalom Cornet est venu sur l’île pour en chasser les sorcières.

« Les Graciées » est le premier roman pour adultes de Kiran Millwood Hargrave et je me suis laissée emporter par son intrigue. Le point de départ du roman fut, pour l’auteure, la découverte sur l’île de Vardø, du mémorial de Louise Bourgeois et de Peter Zumthor qui commémore les très nombreux procès qui eurent lieu à l’époque du roman (52). Kiran Millwood Hargrave s’est inspirée de cette période historique, de ces chasses aux sorcières. Cette reconstitution est l’une des grandes réussites du roman. Le contexte historique, sociétal est extrêmement bien rendu. On comprend que le roi Christian IV veut asseoir son pouvoir par la terreur, par la religion et il veut en profiter pour se débarrasser des populations autochtones qui seront les premières à être jugées. Mais à Vardø, des femmes norvégiennes vont également être accusées de sorcellerie.

Les femmes des « Graciées » sont l’autre atout de ce roman. L’auteure nous montre la réalité de leur quotidien et la rudesse absolue de leur vie dans un climat hostile. Elle montre également que ces femmes ont transgressé le système patriarcal en prenant leur destin en main (pêcher, élever les rennes, l’une d’elle porte un pantalon). Elles devront le payer. Plus elles deviennent indépendantes, plus elles deviennent fortes et plus elles sont dangereuses au yeux des hommes. Les différents personnages auxquels Kiran Millwood Hargrave donnent vie, sont très incarnés : Maren, la jeune femme au centre du roman, apprend à conquérir son indépendance ;  Ursa, mariée de force à Absalom Cornet, découvre la sensualité à Vardø ; Kristen, qui prend les choses en main après le naufrage et qui n’a peur de rien ; Diima, la belle-sœur de Maren, qui a le malheur d’être du peuple sami.

S’inspirant de faits réels, Kiran Millwood Hargrave nous livre une intrigue extrêmement romanesque où se mêlent poésie et réalisme, chasse aux sorcières et quête d’indépendance des femmes. Une auteure dont je vais guetter les prochaines publications.

Merci aux éditions Robert-Laffont pour cette belle découverte.

3 réflexions sur “Les Graciées de Kiran Millwood Hargrave

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