24 fois la vérité de Raphaël Meltz

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1913, Adrien s’est offert une caméra Pathé-Kok, la première caméra pour le grand public. Il aime les nouvelles inventions et prend plaisir à filmer ceux qui l’entourent. Sa petite fille de onze ans, Hélène, est également passionnée par cette caméra. Elle semble avoir un sens inné du cadre et regorge d’imagination. Elle décide un jour de filmer son petit frère, Gabriel, en mettant la caméra sur un chariot et en le faisant glisser le long du couloir. Hélène invente le travelling sans le savoir et malheureusement elle ne verra jamais le résultat de son idée. Hélène meurt quelques jours après dans un accident laissant Gabriel seul et hanté par son absence.

« La photographie, c’est la vérité et le cinéma, c’est 24 fois la vérité par seconde », la phrase de Jean-Luc Godard donne son titre et sa structure au roman ambitieux de Raphaël Meltz. L’histoire, que développe le livre, est celle de Gabriel racontée par son petit-fils Adrien. Vingt-quatre chapitres sont consacrés à Gabriel comme vingt-quatre instantanés de sa vie qui durera un siècle (1908-2009). Cette vie est portée par l’amour de la caméra, de filmer sans cesse. Gabriel poursuit ce que sa sœur a commencé. Sa perte, le manque de la jeune fille marquent les pages du livre et se prolongent sur la descendance de Gabriel qui ne sera constituée que de fils uniques.

Gabriel est un témoin privilégié de l’Histoire, il travaille pour les actualités filmées chez Gaumont puis chez Pathé. Il capte, enregistre le réel : l’enterrement de Sarah Bernhardt, le prix Goncourt d’André Malraux, la venue et l’assassinat du roi Alexandre Ier de Yougoslavie, le retour d’Édouard Daladier des accords de Munich, la libération du camp de Dachau. Un siècle s’imprime sur les pellicules de Gabriel. En contrepoint de ces vingt-quatre chapitres, nous découvrons la vie du petit fils, Adrien, qui vit dans la maison de Gabriel. Ce dernier a su avancer, créer une famille malgré la blessure originelle alors qu’Adrien fait du sur-place. Il fait un métier alimentaire (journaliste sur les nouvelles technologies) et se rêve écrivain à temps plein. La vie de son grand-père pourrait être sa porte de sortie. Les chapitres consacrés à Adrien offrent des réflexions sur l’évolution du cinéma, de ses techniques mais aussi sur la banalisation des images, leur authenticité et leur capacité à garder les traces du passé.

« 24 fois la vérité » est un roman dense, riche de questionnements, touchant grâce à ses personnages construits et incarnés, et habité par le fantôme d’une petite fille de onze ans.

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