La vierge néerlandaise de Marente de Moor

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Été 1936, Janna quitte Maastricht pour se rendre à Aix-la-Chapelle. Son père l’y envoie pour qu’elle perfectionne son escrime. Son maître d’armes sera Egon von Bötticher, un ancien ami de son père qu’il a connu lors de la première guerre mondiale. Le père de Janna est médecin et il a soigné von Bötticher, gravement blessé au visage. Janna a 18 ans et elle rêve de ressembler à Hélène Mayer depuis qu’elle a assisté aux JO d’Amsterdam. Rêveuse, elle imagine, durant son voyage en train, que son maître d’escrime ressemblera au Prince Andreï de « Guerre et paix ». Impressionnant physiquement, von Bötticher accueille de manière froide la jeune fille. Taciturne, peu loquace, il prépare Janna à la découverte de son domaine de Raeren, proche de la décrépitude. « Je me tenais face à un couvercle de cercueil. J’exagère, bien-sûr, mais, quand von Bötticher m’a plantée devant la porte close parce qu’il avait oublié quelque chose dans la voiture, l’aspect solitaire de la maison m’a frappée, comme ma solitude face à elle. Pendant les quelques minutes qui se sont écoulées, j’ai fixé la laque noire, le heurtoir terne et les clous argentés, puis la porte s’est ouverte sur un nouveau personnage d’une pâleur cadavérique qui restait muet sur le seuil. » Cette atmosphère lugubre n’empêchera pas Janna de tomber sous le charme de von Bötticher.

« La vierge néerlandaise » est le premier roman d’une nouvelle maison d’édition Les Argonautes et c’est également le premier roman de Marente de Moor a être traduit en français. Le texte est très riche et mélange l’escrime et son apprentissage, aux premiers émois amoureux de Janna et à l’entre-deux-guerres. Il y est question de ligne que l’on doit franchir ou non. C’est le cas pour la relation que Janna souhaite entretenir avec son maitre d’escrime. Mais la question de la ligne se pose aussi dans le cadre d’un match entre fleurettistes ou lors d’une guerre (les Pays-Bas était neutre lors de la première guerre mondiale).

Marente de Moor nous fait bien sentir le climat délétère qui s’installe en Allemagne. L’imminence de la catastrophe plane sur le Raeren malgré son isolement. Une certaine idée de l’honneur au combat, une certaine aristocratie allemande commencent à être balayées par les nazis. La figure d’Hélène Mayer est d’ailleurs significative, son comportement très ambigu lors des JO de Berlin interroge également la notion de ligne entre le bien et le mal.

« La vierge néerlandaise » nous raconte le passage d’un monde à l’autre : la fin de l’adolescence et le début de l’âge adulte pour Janna, le basculement de l’Allemagne dans la barbarie. Le texte de Marente de Moor nous offre de plus une belle galerie de personnages à la psychologie complexe. Une lecture que j’ai grandement appréciée.

Traduction Arlette Ounanian

2 réflexions sur “La vierge néerlandaise de Marente de Moor

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