Bertram Hemingway, ancien officier de la Royal Navy, est venu passer quelque temps dans un petit port du Sud de l’Angleterre. Il s’essaie à la peinture et fait connaissance avec les habitants de cette petit ville, autrefois station balnéaire en vue. Bertram croise le chemin de Mrs Wilson, une veuve qui gère un poussiéreux musée de cire, la paralysée Mrs Bracey qui empêche ses deux filles de profiter de la vie, Mr Palister le propriétaire du pub, Beth Cazodon romancière et femme du médecin et sa meilleure amie Tory Foyle, divorcée et s’ennuyant. Bertram n’est d’ailleurs pas insensible aux charmes de cette dernière, ce qui modifie quelque peu le but de son séjour en bord de mer.
Dans « Vue sur le port », Elizabeth Taylor nous propose de découvrir la vie d’une petite communauté et pour ce faire, elle passe d’un personnage à un autre tout au long du roman. Il n’y a pas réellement de personnage principal, chacun a une place dans la ville et dans le roman. L’auteure nous offre une galerie de personnages très variés en âge et en position sociale. Ce qui est très appréciable, c’est que tous les personnages sont approfondis, il ne s’agit pas de silhouettes animant le port, mais bien de protagonistes construits, aux psychologies détaillées.
Ce petit port de pêche a connu son heure de gloire, mais aujourd’hui la désaffection des touristes rend la vie terne et morose. Les différents personnages semblent tous souffrir d’une profonde solitude. Le ton du roman est désabusé, même les plus jeunes ne sont pas enthousiasmés par l’avenir. Comme le dit Tory : « Tout est plutôt amer. » Finalement, la seule qui réussit à s’extraire de cette chape de tristesse, c’est la romancière Beth. On lui reproche de se servir de la vie des autres pour ses livres, d’être distante, son mari pense qu’écrire est une lubie passagère. Mais Beth est protégée par son imaginaire, par sa bulle créatrice qui lui permet de s’extraire du monde et de ses contingences matérielles. Un personnage que l’on peut juger trop aveugle mais qui est bien la seule à faire ce lui plait vraiment.
Avec beaucoup d’ironie et de sarcasmes, Elizabeth Taylor décrit le quotidien d’une petite communauté en bord de mer. Une chronique plus profonde qu’il n’y paraît aux personnages attachants.
Traduction Geneviève Doze