Étienne et Sylvia parcourent la France en faisant de l’auto-stop depuis vingt ans. Ils vivent grâce à la gentillesse des habitants des villes et villages qu’ils traversent. Ils sont un peu particuliers, Sylvia se fait appeler Sa majesté et Étienne est roi d’Australie, général major supérieur de la légion française en boites à vœux. A ceux qui les croisent, ils expliquent être en mission divine. Leurs élucubrations amusent plus qu’elles n’inquiètent. Et pourtant, leur errance sur les routes départementales va tragiquement se terminer avec l’assassinant d’un petit garçon.
Stéphane Durand-Souffland, journaliste et chroniqueur judiciaire au Figaro, s’est inspiré d’un fait divers de 2008 pour son roman. L’affaire avait fait grand bruit à l’époque et était remontée jusqu’au sommet de l’État. La thématique de son livre est d’ailleurs toujours d’actualité : faut-il juger les malades mentaux ? Un article du code pénal permet de ne pas le faire, les malades sont reconnus irresponsables pénalement et envoyés en asile psychiatrique. Stéphane Durand-Souffland, prend le temps de nous raconter l’histoire d’Étienne et les différents évènements qui ont conduit au drame. Et pourtant, il fut juger au tribunal, l’abolition de son discernement ne fut pas reconnue. Le roman est également intéressant car il dissèque le mécanisme de la justice, la manière dont le pouvoir et l’opinion publique peuvent l’influencer. Ici, est exigée une sanction exemplaire pour le meurtrier du jeune garçon. L’émotion suscitée par la violence de l’acte empêche les parents, l’opinion publique de comprendre que le meurtrier devrait ne pas être jugé et mis en prison. Mais l’auteur pointe bien l’absurdité d’un procès où les propos de l’accusé sont totalement incohérents et délirants.
Outre cette question passionnante de l’irresponsabilité pénale, j’ai beaucoup apprécié la façon dont Stéphane Durand-Souffland croque en quelques mots les différents personnages de son histoire. Certains le sont avec humour et ironie (on reconnait d’ailleurs sans peine les personnalités publiques qui sont évoquées). Et il épingle également le cirque médiatique autour des faits divers (la visite des deux ministres chez les pauvres parents éplorés est édifiante). La justice ne devrait jamais être un spectacle.
« Mission divine » est un roman très intéressant et parfaitement bien mené sur la question de l’irresponsabilité pénale et le fonctionnement de la justice.
Merci aux éditions de l’Iconoclaste pour cette lecture.
Heureusement que ce que tu dis de ce titre se démarque de l’avertissement du bandeau … Quelle horreur que ce racolage ( qui semble en plus être incohérent avec le propos du livre, l’irresponsabilité pénale !