Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin

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Depuis le décès de la « moman », le père élève seul ses deux fils : Fus et Gillou. Il est ouvrier à la SNCF dans une Lorraine où l’industrialisation est à bout de souffle. Il continue à militer, à chanter l’Internationale avec le peu de camarades qui se déplacent encore dans le local du PC. Il fait ce qu’il peut le père pour tout mener de front et être là tous les soirs pour le dîner avec ses enfants. Il réussit parfois à les amener en vacances loin des mauvais souvenirs et de la douleur de l’absence. Malgré ses efforts, Fus, l’aîné, va bientôt prendre une route dangereuse et détestable. Il se désintéresse de l’école, fréquente des jeunes de l’extrême droite. De quoi faire imploser l’équilibre précaire que le père a essayé d’installer.

Laurent Petitmangin a écrit un premier roman juste et touchant qui plonge au cœur des relations de cette famille modeste. « Ce qu’il faut de nuit » est une histoire d’hommes, une histoire de taiseux, de pudiques qui s’aiment sans arriver à se le dire. On les sent indéfectiblement liés ces trois-là et rien ne semble pouvoir les séparer. Les choix de Fus vont pourtant ébranler ce noyau familial. Et ce que cela fait ressortir, c’est la profonde solitude du père qui se sent totalement perdu et ne sait pas quoi faire pour ramener son fils à la raison. Son profond désarroi est ce qui m’a le plus touchée durant la lecture. Son fils est devenu un étranger à ses yeux mais jamais il ne renoncera à lui.

Ce qui m’a énormément plu dans « Ce qu’il faut de nuit » est la manière dont Laurent Petitmangin entrelace l’intime et le politique. L’histoire de cette famille est aussi celle du territoire dans lequel elle s’inscrit. L’auteur exprime bien la désaffection des militants communistes, les fermetures d’usines, la possibilité de plus en plus acceptable et tentante de l’extrême droite, la nécessité de quitter la région pour réussir, avoir un avenir. L’histoire de cette famille raconte la faillite de la gauche dans les classes ouvrières. Et le désespoir du père vient aussi de ce constat.

Avec une écriture sobre et vibrante, Laurent Petitmangin dresse le portrait bouleversant d’un père perdu qui tente de sauver sa famille. Seules les dernières pages ne m’ont pas entièrement convaincues et j’aurais préféré que l’auteur s’arrête avant.

2 réflexions sur “Ce qu’il faut de nuit de Laurent Petitmangin

  1. Pingback: Ainsi Berlin de Laurent Petitmangin | Plaisirs à cultiver

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