Le pasteur Carteret vient de s’installer à Garth, dans le Yorkshire, avec ses trois filles : Mary, Gwendolen et Alice. Ce déménagement est dû aux élans amoureux d’Alice qui causèrent un scandale dans la paroisse où la famille résidait précédemment. L’impétueuse et amoureuse Alice est donc surveillée de très près par son père autoritaire et austère. Gwenda apprécie cette nouvelle ville où elle passe des heures à marcher dans la lande. Son père a peur d’elle car il la pense capable de tout. Il a en revanche toute confiance en son aînée, disciplinée et obéissante. Les trois sœurs étouffent sous le joug de leur tyran de père. Leur respiration viendra de la présence du jeune docteur du village Steven Rowcliffe. Chacune des sœurs sera attirée par le physique et la personnalité du jeune homme.
« Les trois sœurs » a été publié en 1914 en Angleterre. May Sinclair, qui était écrivaine, critique littéraire et engagée auprès des suffragettes, est malheureusement aujourd’hui méconnue. Son roman est pourtant très plaisant et laisse la part belle aux destinées des trois jeunes femmes. May Sinclair a écrit une biographie des sœurs Brontë en 1912 et le cadre de son roman est imprégné de leur univers. Je n’ai pu m’empêcher de penser à Emily en découvrant le personnage de Gwendolen et sa passion pour la lande. L’autrice nous livre une analyse psychologique poussée des caractères de ses héroïnes. Chacune a sa manière va conquérir son indépendance vis-à-vis de l’imposante figure de leur père. L’autrice traite dans son roman du désir féminin, ce qui est moderne, et la manière dont il est réprimé, honni par la société. Un bon exemple de la modernité du roman est le personnage de la servante Essy qui devient fille-mère et se fiche du qu’en-dira-t-on et de la proposition de mariage de son amant. La place de la femme est sans cesse questionner dans « Les trois sœurs », ce qui le rend particulièrement intéressant.
De facture classique, « Les trois sœurs » nous offre de sensibles et détaillés portraits de femmes qui permettent à May Sinclair des questionnements modernes. J’ai maintenant hâte de découvrir « Vie et mort de Harriett Frean », publié prochainement par les éditions Cambourakis et que le préfacier de ce roman rapproche de « Mrs Dalloway ».
Traduction Mary-Cécile Logé
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