Bilan livresque et cinéma de février

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Un mois de février placé sous le signe de la découverte ! A part la poursuite de la lecture des aventures de la malicieuse Astrid Bromure et la lecture du dernier roman de Stéphane Carlier, je n’ai lu que des auteurs dont je découvrais le travail.

Je me suis régalée à la lecture de la plupart de ces romans, une mention spéciale pour « La vierge néerlandaise » de Marente de Moor qui est également le premier roman publié par une nouvelle maison d’édition : Les argonautes qui se consacre à la littérature européenne non anglophone.

J’ai achevé les lectures du Prix des lectrices et lecteurs des bibliothèques de la ville de Paris avec « Tenir sa langue » de Polina Panassenko et « Jean-Luc et Jean-Claude de Laurence Potte-Bonneville. Ce prix est décerné chaque année à un premier roman adulte. Les trois autres romans en lice sont : « Les enfants endormis » d’Anthony Passeron, « Les gens de Bilbao naissent où ils veulent » de Maria Larrea et « En salle » de Claire Baglin.

Le mois de février ayant passé très vite, je n’ai vu que quatre films mais j’ai quand même eu deux coups de cœur :

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Jeune élève du conservatoire, Antonina est passionnément amoureuse de Tchaïkovski. Elle le rencontre, il la repousse. Elle lui écrit des lettres enflammées et le grand maître finit par céder à ses avances. Il a surtout besoin de sa dote et il la prévient : il ne pourra l’aimer que comme un frère. Tchaïkovski est homosexuel mais Antonina ne veut rien comprendre tant elle est heureuse. Mais ce mariage sera inévitablement un échec et il entrainera sa chute.

Kirill Serebrennikov, lui-même homosexuel, concentre toute son attention sur Antonina, le grand compositeur restera à l’arrière. La passion folle d’Antonina m’a beaucoup fait penser à celle d’Adèle H. Il y a le même aveuglement, la même furie destructrice chez notre héroïne russe. C’est à son humiliation, à sa déchéance que nous assistons durant 2h23. Et Antonina est un personnage souvent peu aimable, elle prendra un amant qu’elle méprisera, elle abandonnera leurs enfants sans le moindre regret. Alyona Mikhailova est extraordinaire dans le rôle titre. Le film de Serebrennikov est particulièrement sombre, les rues de Moscou sont peuplées de mendiants et le destin d’Antonina est tragique (elle mourra dans un asile en 1917). La mise en scène est flamboyante, tourbillonnante. Je regrette uniquement une scène de danse contemporaine dont le film aurait pu se passer aisément.

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A onze ans, Sophie passe ses vacances seules avec son père, Calum, dans une station balnéaire de Turquie. C’est rétrospectivement que Sophie évoque ces moments au travers de films réalisés à l’époque avec une caméra amateur. La jeune fille semble y profiter du soleil, de la piscine, des copains et des soirées organisées. Mais son père, qui se coupe en quatre pour lui faire plaisir, semble être ailleurs par moment et emprunt d’une profonde tristesse.

Le film de Charlotte Wells est un bijou de délicatesse et de sensibilité. Le père, formidablement interprété par Paul Mescal, nous laisse deviner ses fragilités, ses problèmes d’argent et une profonde mélancolie. Celle-ci se distille durant tout le film lui donnant une atmosphère de dernière fois. On ne sait pas ce qu’il adviendra de Calum mais j’ai eu le sentiment qu’il n’y aura plus de vacances comme celles-ci entre le père et sa fille. Le lien entre eux n’en est que plus touchant et plus fragile. « Aftersun » peut paraître modeste mais il se révèle intense et infiniment beau dans l’observation de la relation des deux personnages.

Et sinon :

  • « Pour la France » de Rachid Hami : Une nuit, dans une eau glacée, des élèves officiers se débattent, tentent de s’extirper, de réussir ce rituel de passage. Le lendemain est annoncée la mort d’Aïssa, 23 ans, noyé lors de ce bizutage à St Cyr. Sa famille va se battre pour que l’armée reconnaisse sa responsabilité et pour que Aïssa soit enterré avec les honneurs militaires. Rachid Hami raconte dans son deuxième film l’histoire de son frère Jallal, décédé en 2012. Malgré le résultat du procès (quelques mois de prison avec sursis pour les coupables), il n’y a ni colère ni vengeance dans « Pour la France ». Certes, le réalisateur nous montre le poids de la hiérarchie, du silence, des protocoles au sein de l’armée. Mais il s’agit surtout d’un film sur deux frères aux parcours très différents. L’aîné, Ismaël, se remémore leur enfance en Algérie avec un père brutal, leur fuite en France, un séjour à Taipei où Aïssa finit ses études. Ismaël n’est pas brillant comme son cadet, il traficoque et embarrasse sa famille qui souhaite s’intégrer. Histoire d’un drame familial, d’une volonté de rendre à la France ce qu’elle a donné, « Pour la France » est un film sobre, poignant au casting impeccable (c’est toujours un plaisir de revoir Lubna Azabal ).
  • « Un petit frère » de Léonor Serraille : Rose a quitté l’Afrique avec deux de ses enfants. Elle vient vivre en France et s’installe chez des membres de sa famille en région parisienne. Elle trouve du travail dans un hôtel comme femme de ménage et elle inculque à ses fils l’importance de l’école pour réussir dans la vie. Rose est une femme libre, elle danse, elle aime. Elle finit par s’installer à Rouen après avoir suivi un homme. « Un petit frère » est la vie de Rose, de ses deux fils Jean et Ernest sur une vingtaine d’années. Léonor Serraille chronique le quotidien de cette famille monoparentale venue de Côte d’Ivoire : Rose veut le meilleur pour ses fils sans sacrifier sa vie de femme. Elle fera des erreurs, sera déçue par le hommes mais également par son fils aîné. Le film évite tous les clichés sur l’immigration, la réalisatrice nous livre une histoire toute en nuance. Annabelle Lengronne est époustouflante, elle est magnétique et j’ai été bluffée par la performance intense et sobre d’Ahmed Sylla.

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