En 1843, Grace Marks, 16 ans, est condamnée à perpétuité pour le meurtre de son employeur et de sa gouvernante, enceinte de ce dernier. Le factotum, James McDermott, qui a participé aux meurtres, est quant à lui condamné à mort. Grace se dit innocente et surtout elle dit ne se souvenir de rien. Son amnésie, alliée à un comportement exemplaire lui attirent les faveurs de certaines personnes de la haute société. Au lieu de croupir toute la journée dans sa cellule, elle travaille pour la femme du gouverneur de la prison. C’est dans ce cercle que l’on cherche à la faire libérer. En 1859, le docteur Simon Jordan, jeune médecin spécialisé dans les maladies mentales, va essayer de comprendre Grace. Il veut tenter de lui faire recouvrer la mémoire afin de savoir si elle est innocente ou non.
Margaret Atwood s’est inspirée pour son roman d’un fait divers retentissant du milieu du XIXème siècle. L’auteure choisit d’alterner les points de vue : celui de Grace qui raconte son histoire au docteur Jordan, celui du médecin par les lettres qu’il écrit et reçoit de ses proches, celui d’un narrateur omniscient sur le quotidien du docteur Jordan. Ce procédé nous permet d’avoir différents avis sur l’histoire de Grace et sur Grace elle-même. Cette jeune femme est un personnage extrêmement troublant, mystérieux. Est-elle une grande manipulatrice (elle comprend parfaitement ce que le docteur Jordan veut lui faire dire lors de leurs séances) ? Ou une personne naïve qui s’est trouvée au mauvais endroit au mauvais moment (elle n’avait que 16 ans au moment des faits) ? Margaret Atwood ne tranche pas et c’est la force du roman que de laisser le lecteur se faire son opinion.
« Captive » est, comme souvent chez Margaret Atwood, un roman féministe. Grace raconte sa vie au docteur Jordan. Née en Irlande, Grace et sa famille viennent au Canada dans l’espoir d’échapper à la pauvreté et d’avoir une vie meilleure. Sa mère meurt durant le trajet et Grace va devoir travailler comme servante pour aider sa famille, puis pour fuir la violence et l’alcoolisme de son père. A cette époque, la place de la femme est peu enviable quelque soit son milieu social. Les servantes subissent les agressions sexuelles des maîtres de maison. Certaines meurent en essayant de se faire avorter. Les demoiselles de bonne famille sont elles aussi considérées comme des objets. Elles ne sont bonnes qu’à devenir des épouses sans autres choix possibles, sans connaissance aucune de ce qui les attend. C’est une grande violence qui est faite aux femmes par les hommes. Leur destin était totalement cadenassé. La vie de Grace n’est qu’une succession de maltraitance, de brutalités.
« Captive » est le portrait fascinant d’une femme ambiguë, probablement plus manipulatrice qu’elle n’en a l’air et qui survit dans un monde fait uniquement pour et par les hommes. Margaret Atwood réussit un nouveau plaidoyer féministe avec ce roman.
Merci aux éditions Robert-Laffont.
Merci pour cette chronique. Comme j’ai vu la première saison à la télé de la femme écarlate, j’ai acheté le livre qui est en attente. Pour l’instant je lis le troisième livre de Patrick Ferrer. 🙂
Il y a également une série adaptée de ce roman qui est sortie chez Netflix.
Je me suis promis de découvrir Atwood avec la Servante écarlate mais j’enchaînerai forcément avec celui-là juste après je pense.
J’ai lu plusieurs romans de Margaret Atwood mais toujours pas la servante écarlate…la honte ! Mais il est dans ma PAL, il ne devrait pas tarder à en sortir puisque je veux voir la série après !
Un roman passionnant, assez différent de La servante écarlate et qui donne envie de découvrir encore davantage l’univers de cette auteur d’un féministe lucide et sagace.
Oui, j’aime beaucoup l’univers de Margaret Atwood. Ce n’est pas le cas ici mais elle a vraiment un talent pour les uchronies.
D’elle, je voudrais lire la servante écarlate, et voir la série aussi ! J’ai du pain sur la planche.
Tout pareil que toi !!! La servante est dans ma PAL, y’a plus qu’à l’en sortir !